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 you turn your back ▬ naora

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MessageSujet: you turn your back ▬ naora   you turn your back ▬ naora EmptyMer 18 Avr - 19:14


you turn your backyou're a broken man
« Tu sais quoi faire ? » J’réponds pas, me contente d’un long silence et du regard qui veut tout dire. Il me montre la boîte, j’essaie de l’attraper, il l’éloigne. « J’t’ai posé une question. » « Va t’faire foutre. » C’est sorti tout seul ; et j’vois à sa gueule que c’était pas la réponse attendue. « Merde Io, c’est pas la première fois que j’fais ça. » La première fois qu’on m’a foutue de la Joker’s entre les doigts, j’avais dix ans. Il a pas eu de scrupules pour m’balancer dans la nature avec assez d’poudre pour alimenter un centre de désintoxication pendant un an. Et accessoirement me foutre derrière les barreaux jusqu’à la majorité.
J’sais pas c’qui lui prend tout à coup. J’me dis qu’il doit s’payer ma tête. Et quand il sourit, j’comprends que c’était bien ça. J’retiens la remarque qui me titille la langue, me contente de lever les yeux au ciel. Et il finit par me tendre l’objet – et s’permet encore une remarque, qui me fait grincer des dents.  
Puis il se casse et moi aussi.
J’me glisse dehors, puis dans les rues du ghetto – de mon ghetto. Y a des gens qui disent qu’à force de vivre dans l’ghetto, on devient comme lui. Y a la colère, la haine, la peur, qui hantent les murs, y a la violence et le désespoir ; et nous on absorbe tout, comme des éponges. Quand tu nais à Casma, t’es condamné à y rester. Parce qu’on est trop sales pour les gens de New Brasilia. Parce que y a quelque chose sur notre visage, lueur dans les prunelles, qui fait qu’on passera jamais inaperçu. Pas parmi eux.
Et ça m’fait sourire, ça. Ça m’fait sourire et putain, j’suis contente d’être là, tout plutôt que là-bas, avec ces singes qui paradent comme si le monde leur appartenait, ivres de temps – ces connards qui sauront jamais c’que ça fait, d’avoir moins d’une journée au compteur. Ça les amuse, de nous voir et de nous mépriser. Mais j’me dis qu’un jour le vent va tourner. Et j’prendrai un grand plaisir à les écraser sous ma semelle.
J’triture la boîte, au fond de mon sac et ça m’fait penser à Anton – Anton, il dirait probablement que j’suis qu’une sale hypocrite. Qu’on est des connards à protester contre le Conseil mais à buter les gens avec nos élixirs empoisonnés. Il a pas tort. Mais mon p’tit plaisir personnel, c’est d’me dire que j’vends plus aux riches qu’aux pauvres. Plus cher aussi. Mais faire de la charité, ça a jamais été notre objectif. On est là pour monter un empire, nous. C’est ça qu’Anton il a toujours eu du mal à comprendre.
J’passe par une ruelle, ouvre enfin la boîte pour en extraire les sachets, que j’planque consciencieusement dans mes vêtements, avant d’balancer l’objet derrière une poubelle. Puis j’reprends la marche, pour pousser la porte du bar. « Salut Jon. » « Salut Paul. » « Ce sera comme d’hab ? » « Ouais. » J’l’observe me servir un verre d’une boisson claire. La bouteille, poussiéreuse, paie pas de mine, mais j’sais qu’à l’intérieur y a que de l’eau. Il m’tend mon verre, avec son bras et j’appose mon poignet pour lui refiler du temps. Parce que c’est l’deal.  Parce que c’est la seule manière pour qu’il me laisse faire mes p’tites affaires sans s’en mêler. Ça nous convient bien à tous les deux.
J’passe entre les gens, j’passe entre les tables, les habitués me reconnaissent immédiatement, j’sens leurs regards sur mon dos mais ça m’empêche pas d’continuer à avancer. Puis d’me laisser tomber sur une chaise vide, face à une femme. Elle a les membres qui tremblent, le regard un peu flou – caricature de ces personnes que j’ai si souvent vu passer. Elle en veut. Encore. De ce paradis artificiel. Alors j’lui fais passer un sachet, elle me donne les précieuses heures, puis on se quitte sur un salut cordial.
Et la danse commence. Les visages passent et s’enchaîne ; les échanges dans l’ombre des corps qui se croisent et se séparent.
Et ça me sidère toujours autant, les gens capable de s’arracher la santé pour quelques secondes d’un bonheur aussi dévastateur qu’éphémère. Mais j’ai le compteur qui grimpe et ça me suffit.
J’m’éloigne lentement de l’entrée, puis du centre de la pièce. J’dépose mon verra sur une table au passage et j’prends la direction des toilettes. Et c’est là que y a tout qui se fracasse. J’ai à peine le temps de faire un pas hors de la salle principale, qu’un silence s’installe dans mon dos. Puis la phrase, criée, « QUE PERSONNE NE BOUGE » et finalement, la cacophonie. Les corps qui se heurtent, tentent de s’enfuir, quelques personnes qui passent et me bousculent – s’avouent vaincu en tombant dans un cul de sac. Et moi qui déguerpis, sans demander mon reste, courant comme si ma vie en dépendait (ce qui est probablement le cas). J’évite de justesse une femme sortant des toilettes, que j’me permets pourtant de frôler avec un grognement. « Bouge putain, y a les flics. » Et j'veux pas m'faire ramasser. J'le pense très fort, sans le dire. A la place, j’me faufile dans les fameuses toilettes. Pas de sorties par ici, les fenêtres beaucoup trop petites pour laisser passer un corps. Non, ma cible, c’est le local à produits ménagers. J’ouvre la porte et la maintiens du pied pour me glisser à l’intérieur. Dedans, pas de place pour plus d’une ou deux personnes – pas de lumière, non plus, juste une faible lampe qui peine à faire disparaître les ombres. Mais juste sous le plafond, un panneau, une ouverture, guère grande, et camouflée parfaitement dans le mur. A l’extérieur, c’est pareil, faut sacrément regarder pour se rendre compte de la supercherie.
Moi, c’est en soudoyant Paul, qu’il a fini par me montrer le passage.

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