brothers (gabriel)

Trois jours. Trois longues journées. Il avait le cerveau qui tournait à cent-mille tours minutes Nathaniel alors qu’il se demandait où pouvait bien être passé son frère. Parce qu’il avait tout bonnement disparu de la circulation. Non pas que cette idée ne lui déplaise pas car il aurait préféré qu’il reste dans son monde plutôt que d’être dans ses pattes, avec la mission évidente qu’il s’était fixé de le faire revenir chez lui alors qu’il n’en avait pas la moindre envie, mais il se posait des questions. Trop de questions peut-être. Que faisait-il ? Où était-il ? S’était-il perdu ? Etait-il en danger ? Il l’aurait alors cherché en venant dans les bas-fonds de la ville, cet endroit où il n’aurait jamais dû se retrouver. Lui non plus d’ailleurs. Mais ils n’avaient pas les mêmes raisons pour se retrouver là. Et il était en partie sous la protection d’un des gangs de la ville, au moins jusqu’à ce que Joana ne se décide à parler de ce qu’elle savait sur lui. Mais la principale question qui lui venait à l’esprit était la même. L’avait-il dénoncé ? Ses parents savaient-ils désormais où il se trouvait, dans quel endroit il vivait ? Il n’aurait pas supporté de retourner là-bas. Il ne voulait plus de cette famille, de ce statut. Il crevait pour cette liberté acquise, pour faire ce qu’il désirait depuis toujours, pour parler avec qui il le désirait loin des diktats des patriarches de la famille.

Alors il était là Nath, à tourner en rond dans son appart. A inventer les pires scénarii. A prévoir déjà la suite et la nouvelle évasion de cette prison dorée dans laquelle il ne voulait absolument pas retourner. Est-ce qu’il devait rester ici ou changer dès à présent d’appartement ? C’était une bonne question également. Léger soupir. C’était fou comme il s’y était habitué à cet appartement qui était devenu sa maison en si peu de temps. Un havre de paix dans sa vie. Ce lieu où il était libre de devenir ce qu’il désirait. Et c’était aussi fou comment il pouvait déjà lui manquer. Parce qu’il lui manquait ce frère qui n’était parti que depuis trois jours et pour qui il ne pouvait s’empêcher de quand même se faire du souci. Il lui manquait comme il avait pu lui manquer lorsqu’il avait tout plaqué en le laissant derrière. Il ne savait toujours rien et il ne lui dirait pas. Il fallait qu’il le convainque de retourner chez eux et de l’oublier. Même si ça ne serait pas simple. Même si ça lui ferait mal également. L’avoir de nouveau à ses cotés lui avait rappelé la dure réalité. Qu’il lui avait bien trop manqué, qu’il comptait bien trop pour lui.

Le bruit de la porte d’entrée le fait sursauter. Il a le cœur qui bondit. Il n’y avait pas grand monde qui venait ici. Il a les battements de son cœur qui accélèrent alors qu’il commence à prendre peur. Mais alors qu’il s’approche de l’entrée, c’est le visage de ce frère qui rayonne dans la pièce. Et il pousse un soupir de soulagement. Mais le soulagement laisse place à la colère sur le visage de l’ainé. « T’étais où ? » Y a cette porte qu’il verrouille derrière lui. Il a le regard qui se plante dans celui du cadet, la fureur y brulant. « Pourquoi t’es revenu ? » Serait-il le traitre qui l’avait vendu à ses parents en revenant dans ce lieu. Et même si ce n’était pas le cas, il pouvait avoir été suivi. Trop de questions, trop d’interrogations, trop de craintes, trop de soulagement, aussi. Parce qu’il avait eu un peu trop peur qu’il ne lui soit arrivé du mal pour réagir ainsi. Il lui en voulait de ne pas lui avoir laissé de mot, même s’il ne l’aurait pas apprécié.

Il l’avait attendu pendant plusieurs jours, à se demander ce qu’il devait faire. Lancer un appel de recherche pour frère manquant ou seulement croire qu’il était rentré chez papa-maman parce que mine de rien, ça lui manquait un peu trop. Et puis, subitement, aussi rapidement qu’il était parti il était de retour dans son salon. Il était face à l’ainé qui lançait cette phrase. La seule qui lui venait à l’esprit alors qu’il avait failli mourir de trouille pendant des jours. Alors qu’il lui en voulait d’être parti et peut-être aussi d’avoir pris le risque de revenir. Parce que c’était lui qu’on retrouverait si jamais il avait été suivi. Gab, il s’en moquait bien de rentrer chez leurs parents, il n’attendait que ça, que Nath le suive. Il avait pas encore compris que ce serait jamais le cas. Il le voit la douleur dans le regard de son frère à sa remarque et il s’en veut un peu. Parce qu’il voulait pas le blesser. Mais il appartenait aux Sawyer et il en voulait plus d’eux dans sa vie. Plus jamais. C’était pas pour rien qu’il avait coupé les ponts avec tout le monde, même si c’était difficile. Parce qu’il voulait pas de la tentation de la vie facile aux cotés de celui qui avait toujours été là dans sa vie. « Mais quel accueil chaleureux dis moi ! » Il le suit du regard alors qu’il dépose son sac de voyage dans la cuisine. « Si j’te fous mon poing dans la gueule, tu le prendras comme un bonjour » Et pendant quelques secondes, il se dit qu’il pourrait être capable de le faire, de lui mettre le poing en pleine figure, comme quand ils leur étaient été arrivés de se battre quand ils étaient que des gosses. Mais dans ce monde, ils étaient encore des gosses, Nath, c’était un gosse qui avait grandit un peu trop vite quand il avait découvert la vérité. Et Gab, Gab s’était le gamin qui comprenait pas et qui comprendrait jamais. Parce que c’était pas lui qui allait lui dire. « Essaye toujours. » C’est tout ce qu’il trouve à lui répondre. Parce qu’il a pas envie de se battre mais s’il avait vraiment envie son cadet pouvait essayer. Comme si comme avant, c'était lui qui gagnerait grâce à la différence d'age. Mais les temps avaient changé, il avait grandit aussi le petit frère.

« Si ça te fait tant chier que je sois revenu, dis le clairement. D’ailleurs toi pourquoi t’es encore là ? T’en as pas profité pour te tailler ? Aurais-tu enfin compris ce que c’est que d’avoir des couilles ? » Il se retient d’éclater de rire celui qui a tout quitté devant tant d’ignorance. « Faut fêter ça dis donc, c’est la première fois que tu prends pas la fuite quand un truc te convient pas ! » Et il explose. Parce qu’il en a marre des remarques de son frère. « Pourquoi je suis là ? » Y a la voix qui porte dans le salon, y a les voisins qui entendront certainement vu l’épaisseur des murs mais il s’en moque. « Peut-être parce que c’est chez moi. Oui chez moi Gab. C’est moi et moi seul qui le paye cet appart merdique, sur mon propre temps de vie. Alors si ça te plait pas et que tu préfères retourner dans les jupons de papa-maman, mais fais-le, mais ne reviens pas. » Y a le silence qui assourdissant qui s’installe pendant quelques secondes. « Qu’est-ce que t’as pas compris dans le je ne reviendrais pas à la maison la première fois. Tu crois quoi, que c’est une lubie mon départ ? C’est la meilleure chose que j’ai faite de ma vie même si tu ne le comprends pas. » Y a la colère qui brille dans les regards alors qu’ils se déchirent, ou qu’ils essayent. Il avait déjà essayé une fois de le briser pour qu’il parte, peut-être que cette fois-ci, ce serait la bonne. Mais c’était plus dur en face, c’était plus dur alors qu’il avait vécu avec lui pendant plus d’un mois, c’était plus dur alors qu’il avait pas envie qu’il parte dans le fond. « Mais oui, Nath sa petite vie lui plaisait pas alors il a fugué. T’es tellement à côté de la plaque Gab. Le seul qui a des couilles dans cette famille c’est bien moi. Moi qui n’abuse pas de la vie des autres pour vivre. T’as qu’à demander à ton papa adoré sur quoi elle est bâtie la maison dans laquelle t’as pas pu t’empêcher de retourner dormir. Parce qu’il le sait très bien mais il a pas pu se résigner à tout plaquer. C’est vrai que c’est plus dur quand on a pas tout qui tombe tout cru dans la bouche. » Et en quelques paroles, alors que la colère avait pris le dessus, y avait tout qui avait explosé, les certitudes et les vérités. « Alors maintenant, écoute moi bien, c’est eux ou moi, tu choisis. Mais si c’est eux, autant que tu partes tout de suite, je te laisserais pas mettre en danger ce que je tentes de construire ici, t’as déjà suffisamment foutu la merde en arrivant. » Parce que maintenant les Kiasnev, ils ne lui faisaient plus confiance à Nath, et s’il ne lui avait rien reproché dans un premier temps, peut-être parce qu’il était un peu trop heureux de le retrouver, il ne lui en avait pas moins voulu d’avoir été si peu discret.