je passe des heures infinies à compter les moutons funèbres. (yohan)

C'est comme un tourbillon d'idées sombres dans sa tête depuis quelques jours, il n'arrête pas d'y repenser et ça le bouffe. Parce que pour la seconde fois il ressent cette désagréable impression d'abandon. Il l'a ressenti une première fois lorsqu'elle a jeté son dévolu sur l'autre et Adriel continue de penser que cet homme lui a piqué sa place. Il la connaît depuis des années et il a l'impression qu'il sera toujours le second, qu'elle ne le regardera jamais comment elle le regardait lui. Et ça fait mal. Il est prisonnier de ses propres pensées néfastes. Il essaie pourtant de la sortir de sa tête. Il essaie de regarder d'autres femmes, il essaie presque d'avoir des rendez-vous. Il en a même eu un. Seul et unique. Il n'a pas retenté l'expérience, ça n'a pas marché. Il n'a pas envie de faire des efforts, pas envie de s'intéresser à une autre femme que sa jolie rousse. Et c'est comme ça depuis qu'il la connaît. Et cet amour le consume, cet amour lui retourne le cerveau et lui fait découvrir des sensations nouvelles, des sentiments nouveaux. Et il aime pas trop ça, la jalousie par exemple.
La jalousie ça le ronge.
Le sentiment de satisfaction qu'il a ressenti lorsque l'autre est mort. Il n'arrête pas de se dire que c'est vraiment - vraiment - horrible comment sentiment de ressentir une forme de joie à la mort de quelqu'un. C'est malsain la première pensée qui s'est formée dans sa tête à ce moment là. Il s'est dit que l'autre mort il revenait numéro un dans le cœur de la belle. La douleur ressentie par la jolie rousse a été un vrai coup de poing, un retour brusque à la réalité. Depuis il essaie de lui redonner le sourire parce que Jesse sans sourire ce n'est pas Jesse.
Mais voilà, il a merdé.

Il met son visage dans ses mains, ses coudes sont posés sur la table du café. Il ne pleure pas mais se mord fort la lèvre inférieure. Il se demande encore aujourd'hui pourquoi il a fait ça, ce qui lui est passé dans la tête. Il a envie de se la frapper contre le bois de la table tant il ne comprend pas. Il ne se l'explique pas. Adriel mène une vie carrée, il n'aime pas les surprises et refuse d'en créer et il n'a pas été capable de garder son visage loin de celui la jeune femme. Il l'a embrassé. Si il se concentre suffisamment il peut encore sentir les lèvres de la rousse sur les siennes mais ce n'est plus qu'un lointain souvenir, le vestige d'un moment heureux qui n'a duré que quelques secondes. Quelques secondes parce qu'elle n'a pas cherché à y répondre à ce baiser. Il s'est retrouvé les bras ballants à attendre. Attendre une réaction, à sentir le rouge à ses joues, le feu brûler son visage. Depuis il se sent vraiment débile et il fuit la jeune femme. Il ne veut pas la voir, ne veut pas être confrontée à elle. En fait si, il veut la voir sauf que.
Il a honte. Une honte terrible parce que merde comment il peut expliquer son geste ? Il peut juste pas lui avouer ses sentiments c'est beaucoup trop compliqué pour lui, il a peur d'avouer ses sentiments, il sait pas faire ça.
Non à la place il préfère être assit à la table d'un café. La tête dans les mains, il est dépité. La serveuse a tenté de lui remonter le moral mais il n'y arrive pas, il n'a pas la force, ne veut pas. Il lui adresse juste un petit sourire, pas vraiment joyeux.
Il daigne quand même baisser les bras pour triturer sa tasse, elle contient du café. Le liquide brûlant chauffe ses mains mais il n'y fait même pas attention.
En fait, il ne fait attention à rien.
Perdu dans ses pensées.

Ils n’ont pas gagné le championnat. On pourrait croire que ça a donné un coup à la bonne humeur de Yohan, et pourtant, depuis quelques jours, il fait tout avec le sourire. Ce n’est pas grave. Il n’arrête pas de le répéter aux autres membres de l’équipe. Après tout, il y a quelques années de cela, les Misfits n’existaient même pas. Il y a quelques années, on pensait que des botchers ne pourraient jamais se classer dans le top 3 des meilleurs équipes dans la ligue des wardens. Et pourtant, ils y sont parvenus. Il y a de quoi être fiers, il y a de quoi célébrer. Alors oui, bien sûr, ils ont fini à la même place que l’année dernière. Yohan sait que tout le monde aurait aimé ravir la seconde place aux Titans, mais c’est avec patience, détermination et entraînement qu’ils avanceront. Qui sait, d’ici quelques années, ils pourraient bien ravir même la première place aux Red Lions. C’est ambitieux, d’y penser, mais il sait qu’ils en sont capable. Les Misfits ont des forces que les autres n’ont pas : ils viennent tous d’univers différents, et ça rend l’équipe unique, riche en ressources… Mais surtout, ils connaissent l’échec. Être botcher, c’est être un échec ambulant, pour la société altéanne qui réduit ceux qui ont raté la formation des wardens à des déchets de la société. Mais ce rejet ne les a rendus que plus forts. Ils savent tous de quoi ils sont capables, et surtout, ils ont l’envie vive et passionnée de prouver au public que les botchers sont tout aussi talentueux que les wardens.
Un échec ne définit pas une vie entière.
Il y croit dur comme fer. Il faut continuer à essayer, il faut persévérer, il faut toujours y croire. Yohan a toujours été optimiste - à part peut-être quand il s’agit d’Eliott. Il est confiant pour la suite, et s’il doit motiver les autres, il le fera.
C’est donc le sourire aux lèvres, heureux d’être enfin en vacances après une année compliquée, rythmée par les entraînements et les matchs, qu’il entre dans son café préféré, pour commander sa boisson préférée. Joshua travaille, pas mal de ses amis sont occupés, alors il a décidé qu’aujourd’hui, il ferait tout ce qu’il veut. Manger dans son restaurant préféré, aller au cinéma… Ça ne l’a jamais dérangé de faire tout ça tout seul. Il est heureux d’avoir enfin le temps de le faire.
Il fredonne une chanson qui passe souvent à la radio, lunettes de soleil sur le nez, en sortant du café, mais est stoppé net dans son élan quand il regarde derrière la vitre de l’endroit qu’il vient de quitter. Yohan fronce les sourcils. Il connaît cette silhouette. Il se trompe peut-être, mais il est quasi-sûr qu’il connaît la personne assise, la tête dans ses mains, devant un café. Il pourrait continuer son chemin, continuer sa journée en solo, mais Yohan n’a jamais trop su ignorer les gens. Alors ses jambes le portent sans hésitation de nouveau dans le café. L’identité de l’homme devant la tasse lui est confirmée dés qu’il le voit de face. Adriel.
Il fait beau dehors. dit-il en se postant à côté de la table, un sourire aux lèvres. Mais j’ai comme l’impression qu’à l’intérieur c’est la tempête. Les yeux d’Adriel ont quelque chose d’un peu trop triste, et le fait qu’il était seul devant son café, la tête dans les main… Tous les symptômes de la journée de merde sont là. Je peux m’asseoir ? demande-t-il, son café toujours dans sa main. Il l’avait pris à emporter, mais tant pis. Quelque chose me dit que t’as besoin de parler à quelqu’un. Il propose son aide, mais ne sera pas vexé si Adriel n’en veut pas. Yohan a tendance à parler de ce qui ne va pas, en général, mais il a appris à ses dépends que ce n’est pas le cas de tout le monde. Si Adriel veut se taire, il l’acceptera - mais rien ne l’empêchera d’essayer de lui changer les idées.

Raison de plus pour écouter sa mère, même à trente ans - surtout à trente ans. Il aime vraiment pas ça Adriel, l'état dans lequel il se trouve et c'est nouveau pour lui. Il peine à sourire aux clients mais il se force parce qu'il doit le faire, personne n'a envie de discuter et d'acheter des fleurs à un fleuriste qui sourit pas. Mais quand il est tout seul comme présentement à la table de ce café il peut se permettre de ne pas sourire. Fait rare dans sa vie quand même, habituellement même seul il sourit - ce qui peut lui donner l'air un peu con. Mais comment sourire après son énorme erreur d'embrasser les lèvres de Jesse, il doit apprendre à écouter sa mère. Cette histoire de soulmate c'est la plus grosse connerie de l'univers. Personne n'a le droit ni le pouvoir de lui imposer avec qui il doit finir sa vie, qui il doit aimer. Et si sa mère, sûrement d'autres aussi, ont réussit à mettre de côté cette obligation de soulmate pour vivre heureuse avec le véritable amour de sa vie alors il en est aussi capable. Encore faut-il qu'il trouve la fille. C'est vraiment pas une mince affaire. Parce que déjà il est compliqué en matière de filles, souvent il les trouve pas à son goût. Il trouve toutes les filles jolies parce que toutes les filles le sont. Mais il leur trouve pas le petit truc pour faire chavirer son cœur, pour lui donner envie de s'intéresser à celle-ci plutôt qu'à celle-là. Mais peut-être qu'il y arrive pas parce qu'il ne parvient pas à se sortir la rousse de la tête. Sauf que elle c'est son ex petit ami qu'elle ne semble pas réussir à sortir de sa tête. Les choses étaient plus simples avant sa mort. Elles l'étaient aussi avant que l'autre apparaisse dans la vie de sa rousse. Et elles l'étaient encore plus quand Jesse n'avait pas débarqué dans sa vie, libre d'aimer qui il voulait. Mais les évènements s'étaient enchaînés pour le conduire tout droit dans ce café.
Il relève la tête quand il entend une voix.
Pas n'importe laquelle, il la reconnaît directement. Adriel sait pas trop si il a besoin d'être seul ou si il a besoin de compagnie. Mais il l'aime bien Yohan. C'est un chouette type, ils se connaissent depuis des années. Et il comprend très rapidement qu'il y a quelque chose qui cloche chez le trentenaire. Pas qu'il cherche à le dissimuler de toute manière. Ses lèvres se déchirent en un sourire sans joie. Ouais, c'est plutôt orageux là-dedans. de son index il tapote sa tempe. Quel idiot ! Ouais, il faut être un sacré idiot pour embrasser celle qu'il considère depuis des années comme sa petite sœur de cœur. Mais il a jamais demandé à être considéré comme ça, lui il veut autre chose mais il est conditionné pour n'être que le grand frère protecteur. Il en a juste ras le bol de ce rôle. Est-ce qu'il va l'abandonner pour autant ? Non. Parce qu'il ne tourne pas le dos aux gens adriel même quand il est frustré. Alors il hoche la tête à la question de ami, oui il peut évidemment s'assoir. Désolé pour votre défaite au championnat, vous vous êtes bien défendus. c'est courageux de leur part. Parfois il faut savoir boucler le bec des wardens. Adriel aussi a échoué au processus, il se demande toujours pourquoi parce qu'il se débrouille si bien. Il arrive à faire des choses comme les wardens mais a échoué au processus mais c'est encore une autre question sur sa misérable vie à laquelle il ne veut pas répondre. Peu importe qu'il soit norm vu qu'il fait pousser ses plantes comme un warden, il va pas s'en plaindre et encore moins se dire qu'il est asider et un danger pour altea. Il est même pas certain de connaître ça de toute façon. Il a plus grave à penser, comme le baiser J'ai fais une connerie avec Jesse.

Ouais, c'est plutôt orageux là-dedans. C’est l’invitation que Yohan attendait pour s’asseoir. Il a donc vu juste - pas difficile, vu la tête que tire Adriel, mais c’est une bonne chose qu’il ait remarqué : ça aurait été dommage que le jeune homme reste là tout seul avec son café en pleine tempête. Si Yohan peut jouer les parapluies, alors tant mieux. Désolé pour votre défaite au championnat, vous vous êtes bien défendus. Yohan balaie ces mots de la main, toujours souriant. Merci. Mais t’inquiètes, c’est déjà une victoire pour nous d’en être arrivés là. On a de la chance, et puis on a le temps de s’améliorer. dit-il, confiant. Les autres équipes existent depuis vingt ou trente ans, nous on a à peine 5 ans, on a encore beaucoup de boulot. Il hausse les épaules, prend une gorgée de son café. Je pourrai t’avoir des tickets pour la saison prochaine d’ailleurs, si ça t’intéresse. propose-t-il gentiment, ne voulant pas tout de suite demander au jeune homme ce qui le préoccupe.
Mais il n’a même pas besoin de demander.
Il est assis depuis moins de deux minutes quand Adriel balance, sans détour : J'ai fais une connerie avec Jesse.. Yohan hausse les sourcils. Visiblement, il avait vraiment besoin d’en parler : c’est vraiment sorti tout seul. Ça lui confirme qu’il a bien fait de s’asseoir. Jesse. Il aurait dû y penser, en voyant sa tête, que ça avait forcément un lien avec Jesse. Une connerie? La période n’est pas très bonne, pour la jolie rousse. La dernière fois que Yohan est passé la voir, dans la boutique en sortant d’entraînement, elle avait des cernes jusqu’au cou, et la voix beaucoup trop peu enjouée. Comment la blâmer ? Yohan sait ce que c’est, de voir son lien soulmate brisé - même s’il n’a pas eu l’expérience du deuil. Il a déjà l’impression que son monde s’est écroulé, alors il n’imagine même pas son état à elle. Il ne sait pas comment la soutenir : à chaque fois qu’il veut l’emmener quelque part, qu’il veut lui changer les idées, elle doit travailler, ou elle a des choses à faire. Il se sent un peu impuissant, et ça le frustre d’une force! Elle a besoin de temps, et il le sait bien - mais il aimerait être un peu magicien et réussir à accélérer la guérison des plaies à vif.
Adriel a fait une connerie. Ça peut vouloir dire tout et n’importe quoi. Yohan est tenté d’imaginer toutes les choses possibles - mais décide de ne pas mettre la charrue avant les boeufs, et de laisser son aîné lui raconter. Dans tous les cas, Yohan sent déjà que la situation est mal barrée. Pas qu’il veuille être de mauvaise augure… Mais ce n’est clairement pas le moment de faire des conneries avec Jesse - Adriel le sait aussi, de toute manière. C’est peut-être pour ça qu’il est dans cet état, et qu’il appelle ce qui s’est passé - quoi que ce soit - une connerie. Il finit par soupirer. Qu’est-ce qui s’est passé? Il s’adosse à la banquette. Tu me fais un peu peur. Le visage d’Adriel est si sombre, Yohan s’attend au pire. Ça s’est passé quand ? Il ne sait pas s’il va pouvoir faire grand chose, mais il se prépare déjà à faire le médiateur si besoin. Jesse et Adriel, c’est précieux, ce qu’ils ont - malgré les complications. Si jamais ils se sont disputés, Yohan n’hésitera pas à mettre son grain de sel, même si c’est peut-être se mêler de ce qui ne le regarde pas. Il déteste les conflits, Yohan.

Il se force à sourire, en tout cas il essaie. Ses commissures se soulèvent légèrement pour paraître un peu plus sympathique à l'égard de Yohan, parce qu'il l'aime bien et qu'il veut pas lui envoyer sa mauvaise humeur, sa tristesse, en pleine tête. Il aime vraiment pas être comme ça le fleuriste, d'habitude il sourit tout le temps. Même quand ça va pas il trouve la force de sourire mais cette fois ça va vraiment, vraiment, pas. Si bien qu'il n'arrive pas à sourire, il sait pas trop à quoi son visage peut bien ressembler quand il se force. Mais ça doit certainement être pitoyable. Ses yeux piquent, le manque de sommeil combiné à cette envie irrépressible de se frapper. Parce qu'il se sent incroyablement débile, qu'il a l'impression d'avoir échoué. Jesse c'est comme sa petite sœur. Il est comme son grand frère. Il réclame plus et il se déteste pour ça, il déteste ne pas savoir se contenter de ce qu'elle peut lui offrir, de ne pas savoir rester à sa place. C'est de sa faute. Il ne peut que se blâmer lui même, il l'a embrassé, pas l'inverse. Yohan lui apporte un peu de distraction. Et une épaule réconfortante. Cette fois c'est un sourire un peu plus sincère qu'il parvient à esquisser. Seulement cinq ans et déjà sur le podium, les autres équipes ont de quoi trembler. ils sont doués mais Adriel n'en attend pas moins de son ami de toute manière. Avec plaisir, je viendrai t'encourager. C'est pas forcément son truc le sport, c'est trop pour lui. Adriel préfère la tranquillité de sa petite boutique fleurie aux maillots qui puent la sueur mais il aime bien regarder de temps en temps, histoire de suivre l'actualité.
Il croit d'ailleurs qu'il préfère parler de sport plutôt que du sujet fâcheux qui l'empêche de trouver le sommeil. Mais il ne sait pas mentir Adriel, il ne cherche même pas à mentir du coup et préfère jouer la carte de la sincérité. De toute manière c'est pas quelque chose qui peut rester secret, il se dit que si c'est pas lui qui le raconte alors ça sera forcément la jolie rousse. Il qualifie ça de connerie, il ne voit pas quel autre nom il peut lui donner. Une belle connerie, dont il a tiré plus de malheur que de bénéfice. Il sait que ça valait vraiment pas le coup de tout briser juste pour une simple caresse, un simple baiser rapide. Il se demande encore comment il a pu franchir cette barrière, si seulement il pouvait revenir en arrière .... sauf qu'il ne peut pas, la réalité et le présent lui reviennent en pleine gueule, il est là enfoncé dans sa chaise devant un Yohan qui attend des explications. Quelques jours. c'est plus simple de donner une date approximative que d'expliquer quel est le problème. Il se mord l'intérieur de la joue, plaque ses mains contre la tasse encore chaude. Son regard se perd quelques instants à travers les fenêtres, il observe silencieusement les gens qui se mouvent de l'autre côté, qui n'ont aucune conscience de l'épreuve qu'il traverse. Il prend une grande bouffée d'air, il en a besoin pour se concentrer sur ses pensées, sur les mots qui vont franchir la barrière de ses lèvres. Je l'ai embrassé. qu'il lâche sans plus de cérémonie, fuyant son regard.

Seulement cinq ans et déjà sur le podium, les autres équipes ont de quoi trembler. Clairement, oui. Et ils ne se sont pas faits que des amis, les Misfits. Avoir une équipe de botchers qui bat des équipes de wardens, c’est presque une atteinte à l’ordre social altéan. Plusieurs fois, leur bus a été pris d’assaut par des gens un peu extrémistes un peu énervés. La presse n’est pas tendre non plus à leur égard, depuis la création de l’équipe. Mais Yohan n’en a plus grand-chose à faire. Au début, c’était compliqué. Maintenant, il ignore tous leurs détracteurs. Ils se serrent les coudes, dans l’équipe. Il est content d’avoir des coéquipiers qu’il considère presque comme sa famille, et avec qui il se sent confiant pour faire face à toutes ces conneries. Avec plaisir, je viendrai t'encourager. Yohan frappe dans ses mains, enthousiaste. Il est toujours heureux quand ses proches sont dans les gradins, ça lui donne encore plus envie de réussir - et surtout, de ne pas se faire toucher. Les matchs de Small Science peuvent être violents, et il fait de son mieux pour que ses amis n’aient pas à le voir faire de sales chutes.

Adriel est tellement enfoncé dans sa chaise que Yohan se demande quand celle-ci va l’avaler. On dirait qu’il essaie de se cacher même si personne ici n’est là pour le juger. Yohan a de plus en plus peur : son langage corporel ne lui dit rien qui vaille. Quelques jours. Le sportif hausse les sourcils. Quelques jours ? Ça veut dire que ça fait déjà quelques jours qu’il est dans cet état ? Eh bien, il est bien tombé, alors. Le destin a dû le mener jusque là pour qu’Adriel ne soit plus seul avec ses histoires. Le plus âgé semble tergiverser un peu, regarde dehors avant de finir par lâcher la bombe : Je l'ai embrassé. Yohan ouvre de grands yeux, et sa bouche s’entrouvre sous la surprise. Tu as fait quoi ? dit-il par réflexe, alors qu’Adriel fuit toujours son regard. Yohan éloigne son café pour poser les mains sur la table, et se rapprocher d’Adriel. Tu l’as embrassée ? Il penche la tête pour croiser son regard. Sérieusement ? Il devrait probablement lui dire que ce n’est pas bien… Mais au lieu de ça, il tire un air plein d’admiration. Wow, mec, t’as des couilles. Il rit presque un peu devant l’audace de son ami, et laisse un petit silence passer, le temps de digérer l’information.

Au bout de quelques longues secondes pendant lesquelles Adriel ne croise toujours pas son regard, il finit par dire : Vu ta tête, j’imagine que ça s’est pas passé comme tu voulais ? Il pince les lèvres. Pourquoi là, pourquoi maintenant ? Il y a plein de questions qui lui passent pas la tête. Qu’est-ce qu’elle a dit ? Il suppose qu’Adriel ne doit pas avoir envie de parler de choses qui l’ont blessé, mais Yohan est partisan de la confidence : ça permet de mettre des mots sur les choses, et de se remettre. Et puis avoir un oeil extérieur sur la situation peut aider à avancer, et à faire la bonne chose pour que les choses ne s’aggravent pas. Il se demande bien dans quelles circonstances tout ça a pu arriver, et attend qu’Adriel l’abreuve des détails, curieux mais aussi plein d’empathie. Il sait ce que c’est, d’aimer quelqu’un qui n’en a rien à faire, alors s’il s’est fait rejeter (ce qui semble être le cas), Yohan pourra clairement lui donner des conseils, d’expérience.