Dirty paws - Cliff

Lance ne faisait jamais ses joggings à des intervalles réguliers. Premièrement parce qu’il ne voulait pas qu’on remarque un quelconque rythme dans ses sorties de l’appartement. Il y laissait Grim seul et même si techniquement il ne risquait pas grand-chose dans son loft hyper sécurisé, la vie avait appris à Lance à être prudent, voire carrément parano. L’autre raison, c’est qu’il en avait de toute manière rarement le temps. C’était néanmoins un plaisir qu’il s’accordait, occasionnellement. Ça le détendait un peu, de courir sur l’asphalte. Et se détendre, il en avait bien besoin en ce moment. Depuis que son soulmate avait retrouvé sa sœur et appris l’existence d’un autre univers, Lance en avait pris conscience lui aussi, inévitablement. Et il tenait la patate chaude entre ses mains sans savoir quoi faire de cette information. Jusqu’alors il avait toujours été persuadé que son soulmate était là, quelque part. Le savoir dans un autre monde le soulageait autant que cela l’affligeait. Et puis merde, un autre monde, vraiment ?!? Alors oui. Il avait vraiment besoin de se détendre.
Le matin, le brouillard se levait un peu, ce qui offrait davantage de luminosité que le reste de la journée. Mais même dans les meilleures conditions météorologiques possibles, Lance ne sortait jamais sans son masque antipollution, et l’atmosphère restait froide et sombre. Le garde du corps arrivait au croisement d’un parc lorsqu’une silhouette familière le fit ralentir l’allure. Cliff. Avec des chiens. Le nouveau passe-temps de Grim, recruter dans son équipe n’importe qui sous prétexte qu’ils ont du talent. Jad, Cliff. Avec ce genre de joueurs Chaos n’aurait même plus besoin de truquer les matchs pour qu’ils perdent. Le gars bossait dans un resto vegan et baladait des chiens de refuge. Il avait fait de la prison pour le meurtre d’un gars et était suspecté d’être aussi lié à la disparition de son ex, donc… niveau réputation on avait vu mieux. Enfin ça prouvait juste qu’on pouvait être un psychopathe et aimer les animaux, hin. Mais pour Grim, aucun problème. Rejoins notre équipe d'Exy mec, t'as l'air totalement fréquentable, ça va être génial... Crétin. C'était le genre de décision prise sur un coup de tête qui donnait à Lance envie de se tirer les cheveux. Ou une balle, au pire.
« Cliff ! » S’exclama Lance alors qu’il arrivait à la hauteur du gamin, gardant néanmoins une distance de sécurité vis-à-vis des chiens. Non pas qu’il n’aimait pas les chiens… Il avait du mal, mais il les aimait bien. C'était juste bizarre.
Il retira ses écouteurs et s’étira, reprenant petit à petit son souffle. C’était la première fois qu’il croisait l’afro dans le coin. « Je savais pas que tu baladais tes chiens dans le quartier. » Si je marche dans une merde à l’occaz je serais à qui m’en prendre, cimer. « Tu vas où là ? »

les yeux sont encore collés ; cliff peut sentir dans chacun de ses membres la fatigue du peu d'heures passés dans son lit. ou plutôt, à dormir ; il s'est glissé dans les draps assez tôt, avec son portable et dives épisodes, son téléphone à la main. il ne pourrait dire combien d'épisodes ont été vus, ni combien de messages ont été échangés avec scar. il préfère ne pas calculer, ne pas y penser, pour ne pas sentir le rouge se glisser contre ses joues ou encore, avoir envie de reculer. le joueur d'exy se sait capable d'une telle chose ; il en meurt d'envie, après tout, la plupart du temps. il suffit d'un bref silence dans une conversation avec le brun pour qu'il ne pense à fuir. il suffit d'une simple pensée pour qu'il n'envisage de supprimer son numéro de téléphone, le bloquer, et de passer à autre chose. dans sa main, la laisse des chiens. dans l'autre, enfoui au fond de sa poche, son téléphone. cliff fixe quelque chose ; le vide, certainement. il laisse les bêtes le trainer sur une certaine distance ; elles connaissent le chemin, après tout, et retient un soupir, passant ses doigts dans ses cheveux. ils ont poussés, depuis la prison. il envisage de les raser de nouveau. pourtant, il les a toujours porté long. mais il a perdu l'habitude. une part de lui, aussi, se souvient ; des paroles murmurées à son oreille, par curtis, disant ; elle est où sa crinière, mon mouton ? des souvenirs lui sont venus. des souvenirs dont il avait oublié l'existence, pourtant.
il n'entend pas, les premières secondes, les aboiements des chiens. encore moins la voix de lance qui, s'approchant, se situe du côté de son oreille hors service. un sursaut le prend lorsque le brun se met dans son champ de vision. cliff fronce des sourcils, agacé sans savoir pourquoi, et tournant un peu la tête dans sa direction, perçoit mieux les aboiements plus calmes, cette fois, et un semblant de fois. une grimace traverse ses traits et il soupire par ses narines. quoi ? tu veux quoi ? les mots sont brusques et peut-être un peu plus fort ; il ne s'entend pas réellement, et essaie de couvrir le bruit des chiens. goliath, brutus, chut qu'il grogne, posant une main contre le pellage du dalmatien, plus colérique que le second. un fin sourire plane brièvement sur ses lippes lorsque les bêtes se calment, puis il dévisage lance, une nouvelle fois. il en sait que penser de lui. il ne l'a vu qu'à de rares occasions, mais le joueur d'exy sait reconnaître certains regards. et le plus âgé le toise souvent d'un oeil qui ne lui inspire pas confiance. bien que, au final, à qui cliff fait réellement confiance ?
son regard reste posé sur lui un moment, la main caressant toujours brutus, avant qu'il ne soupire une énième fois. il meurt d'envie d'un café, mais plusieurs factures approchent, et la monnaie manque. le sommeil est minime et la patience également. j't'entends pas. il pointe son oreille droite, comme explication. une part de lui espère que lance disparaisse mais cliff sait que la plupart des rêves ne se réalise pas, qu'importe s'ils sont petits.