Parksen + Oh no ! Not You Again !

Liam souleva la bâche qui recouvrait le corps allongé sur le sol et laissa échapper un sifflement impressionné en voyant l’état dans lequel se trouvait la victime. La vache ! Le type qui s’en était pris à lui s’était vraiment acharné pour qu’il finisse dans un état pareil.
Gardant la bâche levée, il tourna la tête vers l’un des flics qui se tenait juste derrière lui. « Ils sont tous dans cet état ? » Son collègue acquiesça, l’air grave. « Ouaip. Et on a déjà vérifié, aucun androïde parmi eux. » L’inspecteur hocha la tête et recouvra le corps avant de se relever en grommelant. « Ok. Un lien entre les victimes en dehors de ça ? » Le flic lui fit non de la tête. « On a encore rien trouvé pour le moment. » Liam poussa un soupir dépité et s’alluma une cigarette avant de laisser son regard parcourir la scène de crime. C’était signé Crimson Riot ça, c’était évident. Il n’y avait qu’eux pour perpétrer des carnages pareils.
Il allait encore se retrouver avec une tonne de boulot sur les bras avec ces conneries…

« Inspecteur Jensen ! » Liam se retourna rapidement dans la direction de la voix. « Il faut que vous retourniez au central. » L’inspecteur fronça les sourcils. Qu’est ce que c’était que cette connerie encore ? « Pour quel motif ? Je suis en plein sur une affaire là ! » Le flic sembla légèrement décontenancé par son ton mais répondit rapidement. « On a récupéré un témoin de la scène. Et vu que c’est vous qui êtes en charge, on s’est dit que vous vouliez l’interroger en premier. » Liam resta un moment perplexe mais hocha finalement la tête. Il se dirigea rapidement vers son véhicule et s’immobilisa au moment d’y entrer pour interpeller les deux flics. « Vous me ramenez les corps pour une autopsie et vous me scannez toute la zone sur un bloc. » Ses deux collègues acquiescèrent de concert. « Et je veux le rapport sur mon bureau dès que vous aurez terminé. » Il ponctua sa phrase par un hochement de tête et lâcha un dernier. « Merci. » Avant de finalement monter dans sa voiture et de démarrer rapidement le moteur.

*  *  *

Liam franchit les portes du commissariat en grommelant à cause du froid et frotta rapidement ses mains l’une contre l’autre pour essayer de les réchauffer. « Ah inspecteur ! » Il se retourna vers la jeune femme de l’accueil et la salua brièvement. « On a ramené votre témoin dans la salle d’interrogatoire B. » « Très bien merci. » Il s’éloigna rapidement pour emprunter les escalier et parcouru les étages qui le séparaient de la salle d’interrogatoire, faisant un bref détour par son bureau pour y déposer sa veste et récupérer sa tablette pour y noter le compte rendu de l’interrogatoire.
Et cette bande de branques qui n’avait même pas eu la bonne idée de lui donner l’identité de son témoin… C’était la base tout de même ! Il y avait des fois où il pourrait les frapper.

L’inspecteur se retrouva rapidement face à la porte de la salle et y entra doucement, refermant dans la foulée la porte dans son dos.
Occupé à pianoter sur son écran pour le paramétrer, il ne releva les yeux vers le témoin que quelques secondes après être entré et se figea en soufflant un. « Oh c’est pas vrai. » Il secoua la tête en soupirant. « Bien sûr. Il fallait que ce soit toi. » Soupirant de plus belle, il tapa rapidement sur sa tablette pour y inscrire le nom Lennie Parker, activa la caméra placée dans un des coins de la pièce et tira la chaise libre jusqu’à la table à laquelle était installée la jeune femme pour s’asseoir face à elle, gardant un air toujours aussi blasé.  

« Bien. Mademoiselle Parker. » Ouais, l’appeler Lennie lui semblait un peu trop familier. Et synthétique un peu trop… Déplacé. Surtout parce qu’ils étaient filmés. Dans le cas contraire il ne s’en serait pas privé. Son visage reprit une expression plus neutre et il se recula légèrement sur sa chaise pour être un peu plus à l’aise. « Vous êtes donc là pour rapporter un témoignage. C’est bien ça ? » il détestait devoir employer un ton aussi formel avec elle mais il n’avait pas trop le choix. Ils ne se voyaient pas pour discuter tranquillement, c’était dans le cadre d’une enquête. Il ne pouvait pas vraiment se permettre de la tutoyer. Elle par contre, il était persuadé qu’elle ne se priverait pas de l’insulter allègrement. Interrogatoire ou non.
« Vous voulez un café ou quelque chose ? »

Lennie n’avait aucune putain d’idée de ce qu’elle faisait là. Bon, clairement, elle savait pourquoi elle était là. Elle avait été témoin d’une attaque à la bombe qui avait fait plusieurs morts et plusieurs blessés. Elle se promenait simplement dans les rues, Charlotte lui ayant demandé de faire une course pour elle. Si elle avait su qu’elle se retrouvait dans un tel merdier, elle lui aurait dit d’y aller elle-même. La jeune femme fronça les sourcils et essaya de croiser les bras mais fut empêchée par les menottes qui la retenait à la table. Elle poussa un soupir et reposa ses poignets sur la surface, s’affalant. Nan, elle n’aurait pas voulu que son amie se retrouve là-dedans. Qui sait ce qui aurait pu lui arriver ? Elle avait eu de la chance de ne pas se retrouver plus proche de l’explosion après tout… La blonde aurait pu avoir moins de chance. À la pensée que son amie aurait pu être blessée, elle eut un frisson de peur et se recroquevilla un peu  plus sur elle-même. C’était peut-être mieux que ce soit elle qui ait été faire cette course après tout… Même si la situation actuelle ne s’annonçait pas rose, loin de là.

Les premiers policiers arrivés sur la scène de crime l’avaient d’abord aidé à se relever, après avoir sécurisé le périmètre et avoir vérifié que le terroriste n’était plus présent. Mais dès qu’ils avaient vu le cercle de lumière sur sa tempe, leur comportement avait changé. L’un d’eux avait même porté sa main à l’arme se situant à sa ceinture. Elle s’était figée alors que sa tête tournait toujours à cause du souffle de l’explosion qui l’avait envoyé valser à l’autre bout de la rue. Son regard s’était plongé dans celui du policier en face d’elle où la peur et la méfiance étaient présentes. « Mademoiselle… Je vais vous demander de lever les mains au dessus de votre tête. » Elle avait voulu protester, s’énerver, expliquer qu’elle était, elle aussi, une victime dans cette histoire mais la peur d’être détruite et d’être envoyée au rebuts l’avaient retenus. Alors, elle avait serré les dents, sentant les larmes d’humiliation monter. Elle les avait retenues et avait levé les mains au dessus de sa tête. « Maintenant, à genoux. » Elle s'exécuta alors que le premier policier lui passait les menottes, lui mettant les mains dans le dos. Elle resta assise tandis que le deuxième appelait des renforts et des secours pour les blessés. D’un geste brusque, il l’avait fouillé, vérifiant qu’elle ne transportait aucune arme. Elle avait eu l’impression que les événements avaient duré une éternité avant qu’ils ne la mettent dans une voiture de fonction, l’emmenant au commissariat central pour un interrogatoire.

Et cela faisait au moins, quarant-cinq minutes que ça durait - voir une heure, elle était un peu perdu dans le temps avec ces événements. Ils l’avaient laissée là, l’attachant à la table en lui disant d’attendre l’inspecteur en charge de l’affaire. Qu’est-ce que c’était que ce travail d’amateur ?! Avec la chance qu’elle avait, elle allait se taper un inspecteur de la vieux de la vieille qui préférait prendre son temps pour les interrogatoires et qui ne chercherait pas plus loin le bout de son nez, la déclarant coupable parce qu’elle était une androïde et présente sur les lieux du crime. Elle poussa un soupir et sa tête s’écroula sur la table, faisant un bruit qui résonna dans la pièce. Enfin, la porte s’ouvrit et Lennie releva la tête si vivement qu’elle était presque sûre que si elle avait été humaine, elle se serait fait mal. Un soulagement l’envahit en voyant l’inspecteur de dos qui refermait la porte. Bon, déjà ce n’était pas un vieux croûton elle avait peut-être une chance. Mais quand il se retourna vers elle, elle sut qu’elle était baisée. Bordel, sur tous les inspecteurs possibles, il avait fallu qu’elle tombe sur ce connard de Jensen. Un grognement lui échappa tandis qu’elle plongeait sa tête dans ses mains. C’était un cauchemar… Et elle n’était apparemment pas la seule à penser la même chose. « Oh c’est pas vrai. » Elle releva la tête alors qu’il secouait la sienne en soupirant. « Bien sûr. Il fallait que ce soit toi. » Il soupira à nouveau et un grognement échappa à la jeune femme. « Parce que tu crois que ça me fait plaisir de voir ta sale gueule... » murmura-t-elle afin qu’il ne l’entende pas. Elle ne tenait tout de même pas à se retrouver en taule parce qu’elle avait insulté un inspecteur. Quoique… Si c’était pour l’insulter lui, elle ferait peut-être un effort. Après tout, peut-être que Charlotte aurait assez d’influence avec le nom de sa famille pour la faire libérer… C’était tentant d’essayer…

Elle se reconcentra sur son vis-à-vis qui activait la caméra avant de tirer la chaise afin de s’asseoir en face d’elle, avec un air blasé qui le caractérisait quand ils se retrouvaient tous les deux. « Bien. Mademoiselle Parker. » Elle haussa un sourcil, perplexe. Il savait se montrer professionnel ? C’était bien une première… Il avait plutôt tendance à être assez agressif quand il travaillait pour la famille Von Huisman. Il s’appuya sur sa chaise alors que son visage prenait un air neutre. « Vous êtes donc là pour rapporter un témoignage. C’est bien ça ? » Elle haussa les sourcils, sceptique. Elle pouvait sentir qu’utiliser un ton aussi formel avec elle lui écorchait la bouche ce qui arracha un sourire en coin à la jeune femme. « Vous voulez un café ou quelque chose ? » Elle eut un petit rire ironique, leva ses mains menottés à la hauteur du visage de l’inspecteur et les secoua afin de faire entrechoquer le métal. « Parce que t’as l’impression que je suis là pour un témoignage, Jensen ? Je te savais stupide mais à ce point... » Elle se recula dans son siège tout en abaissant ses mains. « On me disait pourtant qu’un “pro”- », elle fit les guillemets avec ses doigts, « -devait venir m’interroger, pourtant c’est pas les détails qui te sautent aux yeux. Et si vous traitez vos témoins de la sorte, j’imagine même pas comment vous traitez les coupables... » Elle lui lança un sourire insolent, étendant ses jambes et ne fit même pas attention au faite que leurs jambes se touchaient - plutôt mourir que de reculer la première, si ça le gênait il n’avait qu’à enlever les siennes. « Et depuis quand je suis “mademoiselle Parker”, je me souviens qu’il n’y a pas si longtemps tu m’appelais plutôt la synthétique ou la boîte de conserve. Vas-y, j’ai l’habitude et pas que ton avis sur moi m’intéresse grandement... » Elle poussa un soupir alors que ses mains commençaient à jouer avec les bagues présentes sur ses doigts dans un tic habituel. « Et puisque tu le proposes si gentiment, une première, je veux bien un café et une clope, merci. » L’un de ses sourcils eut un sursaut, le défiant de lui obéir. Il l’avait toujours traitée comme de la merde, pas question de lui faire de cadeaux parce que monsieur était devenu inspecteur.

Lennie eut un petit rire ironique qui fit pousser un soupir dépité à l’inspecteur. Ouais, elle allait lui en mettre plein la tronche.
Elle leva dans la foulée ses mains devant elle, faisant tinter ses menottes. « Parce que t’as l’impression que je suis là pour un témoignage, Jensen ? Je te savais stupide mais à ce point... » Liam avisa les menottes, l’air surprit. Pourquoi est ce qu’elle était attachée ? Ses collègues lui avaient pourtant dit qu’elle était reçue comme témoin, pas comme suspect.
Ça n’allait pas arranger sa relation avec la jeune femme, c’était certain.

« On me disait pourtant qu’un “pro”- », elle mima les guillemnets avec ses doigts mais il préféra ne montrer aucune réaction. « -devait venir m’interroger, pourtant c’est pas les détails qui te sautent aux yeux. Et si vous traitez vos témoins de la sorte, j’imagine même pas comment vous traitez les coupables... » Un nouveau sourire -toujours aussi hypocrite- étira ses lèvres et l’inspecteur ne lui répondit que par un hochement de tête traduisant l’état de fatigue dans lequel il se trouvait. Ouais. Ses collègues le fatiguaient, tout comme cette affaire, et le comportement de la jeune femme était loin d’arranger les choses.

Il sentit l’une des jambes de Lennie le toucher mais n’y prêta pas attention. Il savait très bien qu’elle faisait ça pour essayer de le mettre mal à l’aise. « Et depuis quand je suis “mademoiselle Parker”, je me souviens qu’il n’y a pas si longtemps tu m’appelais plutôt la synthétique ou la boîte de conserve. Vas-y, j’ai l’habitude et pas que ton avis sur moi m’intéresse grandement... » Oui, il l’avait appelée comme ça du temps où il bossait encore pour les Von Huisman mais là, ils se retrouvaient dans le cadre d’une enquête. Il fallait qu’il reste un minimum professionnel. « Et puisque tu le proposes si gentiment, une première, je veux bien un café et une clope, merci. » Il nota son haussement de sourcil et la défia un moment du regard avant de laisser un bref rire nasal lui échapper. Non, absolument rien n'avait changé entre eux.
Il hocha une nouvelle fois la tête en soufflant un. « Ok. » Et se releva de sa chaise avant de quitter la salle d’interrogatoire après avoir coupé la caméra.

Une fois à l’extérieur il se dirigea d’un pas lent jusqu’à la machine à café la plus proche. Il lança une première tasse et profita qu’elle coulait pour se masser les paupières en grommelant.
Qu’est ce qu’il s’était dit déjà ? Ah oui. Que cette journée s’annonçait extrêmement longue.
Les deux tasses prêtes, il retourna dans la salle où l’attendait toujours l’androïde. Il en déposa une devant la jeune femme, soufflant un. « Avec un demi-sucre c'est bien ça ? » qu'il ponctua par un sourire satisfait et l’autre tasse à sa place avant de détacher ses menottes. Il se laissa ensuite retomber sur sa chaise en soupirant bruyamment puis fit glisser son paquet de cigarettes avec son briquet vers Lennie après en avoir lui-même pris une en bouche. Il écarta légèrement les bras, l’air toujours aussi blasé. « Satisfaite ? » Il n’attendit pas de réponse de la part de son vis à vis et s’alluma sa clope.

Bon. Maintenant qu’il avait répondu à ses exigences est ce qu’elle allait être un peu plus coopérative ? Il en doutait toujours.

« Je tiens juste à préciser un truc avant qu’on ne reprenne. » Il tira une latte sur sa clope avant d’en souffler la fumée vers le plafond. « Ils m’ont dit qu’un témoin m’attendait. Pas que tu étais considérée comme suspecte. Donc désolé pour les menottes. J’étais pas au courant. » Il posa brièvement son regard sur la caméra, réalisant qu’il ne l’avait pas remise en route, haussa les épaules, l’air de dire “tant pis” et se reconcentra sur sa tablette pour commencer à y noter les erreurs de ses collègues. Ils allaient en entendre parler de cette affaire.

Il quitta sa tablette des yeux pour les relever vers Lennie. « Je me doute bien que ça doit te surprendre que je ne rentre pas dans ton petit jeu et que je ne te traite pas de synthétique ou autre mais cette affaire me promet quelques nuits blanches. Donc j’aimerai bien qu’on en finisse rapidement. Plus vite on en aura fini, plus vite tu pourras rentrer chez toi. Ça te va ? » Un léger sourire en coin étira ses lèvres. « Du coup. S’ils t’ont embarquée j’imagine que c’est parce que tu étais sur les lieux au moment de l’explosion ? » Il savait pertinemment que c’était surtout parce qu’elle était une androïde mais il se doutait bien qu’elle ne se priverait pas de le lui rappeler. « On va essayer de faire ça dans l’ordre. Est ce que tu peux me dire pourquoi est ce que tu te trouvais dans le coin ? Et si tu as vu quoi que ce soit qui te semblerait suspect avant que l’explosion ne se déclenche ? » Il priait intérieurement qu’elle ne se décide pas à continuer à le pourrir et comprenne que ça ne l’avancerait à rien elle non plus. Comme il venait de le lui dire, il n’avait pas que ça à faire et ne se sentait vraiment pas d’humeur à se lancer dans une bataille de piques avec elle.
Ils avaient tout à gagner à coopérer pour une fois. Tout dépendait d’elle.

Elle fut presque déçue en se rendant compte qu'il ne réagissait pas à leurs jambes qui se touchaient mais elle ne lui montra pas – beaucoup trop fière pour ça. Il la défia du regard avant d'avoir un bref rire nasal. Elle pencha la tête sur le côté, perplexe face à son comportement. Il hocha à nouveau la tête en lâchant un bref « Ok. » avant de se relever de sa chaise, d'éteindre la caméra et de quitter la salle. Elle poussa un soupir et leva son regard vers le plafond. Allait-il confier l'enquête à quelqu'un d'autre ? Si c'était le cas, elle était encore plus baisée qu'elle ne le pensait. Même si elle ne pouvait pas l'encadrer, Jensen savait faire son boulot. Elle avait du mal à le reconnaître mais, quand il protégeait Charlotte, il avait toujours été très efficace et professionnel – enfin, sauf avec elle, bien sûr. Et, malgré son animosité pour ce qu'elle était, il n'aurait jamais laissé le vrai coupable s'échapper. Il aurait préféré crever plutôt que de laisser des victimes innocentes invengées. Elle se redressa sur sa chaise et fut surprise de se rendre compte qu'elle le connaissait à ce point. Malgré leurs divergences, ils avaient apparemment appris à se connaître... Le fait qu'elle ait dû garder son masque d'androïde soumis en face de la famille Von Huisman a joué. En effet, quand elle se retrouvait en présence des parents de Charlotte, elle avait appris à se taire, observer et à apprendre des choses. C'était sûrement durant ces moments-là, s'ennuyant, qu'elle avait dû faire attention à lui. Elle poussa un soupir, ferma les yeux et se prit la tête dans les mains. Elle était vraiment pas prête pour un face à face avec Liam. Elle n’en avait pas la force, surtout pas alors qu’elle essayait depuis quelques semaines de contacter les Crimson Riot afin de défendre les androïdes. Certes, elle ne voulait pas faire de victimes innocentes, ne souhaitait pas utiliser de solutions trop extrêmes mais les faits étaient là : elle essayait bel et bien de faire partie de leur groupe.

Au son de la porte s’ouvrant, elle releva la tête et vit Jensen arriver avec deux tasses. Il en déposa une devant elle et prit la parole avec un sourire satisfait. « Avec un demi-sucre c'est bien ça ? » Elle écarquilla les yeux, surprise. Elle ne pensait pas qu’il s’en souviendrait… Apparemment, elle n’avait pas été la seule à faire attention aux petits détails durant son job de garde du corps. Il déposa la sienne en face de lui et détacha les menottes. Elle attrapa ses poignets et les frotta doucement. Les policiers qui l’avaient arrêtée n’y avaient pas été de main morte et n’avaient pas hésité à resserrer les menottes. Ils n’avaient encore aucune preuve mais le simple fait qu’elle soit un androïde avait suffit à la faire condamner à leurs yeux. Et ils s’étonnaient qu’ils se rebellent… Il se laissa ensuite retomber sur sa chaise en soupirant bruyamment avant de lui envoyer un paquet de cigarettes avec un briquet. Elle s’en attrapa une avant de le l’allumer. Elle avait beau être une androïde, elle adorait ces petits plaisirs coupables que les humains avaient créés - le fait qu’il n’y avait aucune conséquence négative sur son organisme était un bonus non négligeable. Elle souffla la fumée en l’air, observant les voluptes quand la voix de Liam la ramena sur terre. « Satisfaite ? » Elle eut un vrai rire, cette fois. Son petit numéro l’amusait assez. C’est vrai qu’elle avait été énervée par les policiers qui l’avaient arrêtée mais, au final, Jensen avait, pour une fois, était assez correct avec elle, voir presque gentil. Elle décida de lui laisser le bénéfice du doute et d’écouter ce qu’il avait à dire. Elle touilla son café avant d’en prendre une gorgée et de se concentrer sur ce que son vis-à-vis avait à dire. « Je tiens juste à préciser un truc avant qu’on ne reprenne. » Il avala une bouffée de fumée avant de la recracher vers le plafond et Lennie l’imita. « Ils m’ont dit qu’un témoin m’attendait. Pas que tu étais considérée comme suspecte. Donc désolé pour les menottes. J’étais pas au courant. » Elle haussa un sourcil surpris. Okay… Elle s’attendait à tout, sauf à des excuses. Avant, ils n’étaient pas vraiment du genre à faire ce genre de chose l’un envers l’autre. Le fait qu’il réussisse à reconnaître ses erreurs - certes celle-là n’était pas la sienne mais quand même - était un exploit en soi. Elle se redressa et rapprocha la chaise de la table avant d’avaler une nouvelle gorgée de café, attentive aux prochaines paroles qu’il allait prononcer alors que celui-ci notait différentes informations sur sa tablette. Son regard plongea dans le sien quand il releva la tête. « Je me doute bien que ça doit te surprendre que je ne rentre pas dans ton petit jeu et que je ne te traite pas de synthétique ou autre mais cette affaire me promet quelques nuits blanches. Donc j’aimerai bien qu’on en finisse rapidement. Plus vite on en aura fini, plus vite tu pourras rentrer chez toi. Ça te va ? » Il lui souria et elle acquiesça à ses paroles. C’était le plus logique à faire, en effet. Mais arriveraient-ils - arriverait-elle - à rester civilisés en était une autre... « Du coup. S’ils t’ont embarquée j’imagine que c’est parce que tu étais sur les lieux au moment de l’explosion ? » Elle voulut prendre la parole mais il l’interrompit souhaitant donner quelques explications supplémentaires. « On va essayer de faire ça dans l’ordre. Est ce que tu peux me dire pourquoi est ce que tu te trouvais dans le coin ? Et si tu as vu quoi que ce soit qui te semblerait suspect avant que l’explosion ne se déclenche ? »

Elle tira une taffe sur sa cigarette, recracha la fumée et avala une gorgée de café. Elle prit son temps. Certes, elle était décidée à coopérer mais autant faire durer un peu le suspense. Après tout, elle n’allait pas oublier les mauvaises habitudes d’un claquement de doigt. « Merci pour le café et la clope.  » Elle laissa un petit blanc avant de lever ses poignets à hauteur du regard. « et aussi pour ça, tu n’étais pas obligé. » Autant tenter le coup d’être agréable, après tout, ce n’était que le temps de l’interrogatoire. « Je vois que tu n’es pas le plus incompétent de ce service si tu n’étais même pas au courant que j’étais la suspecte sur l’enquête alors que tu en es en charge. » Elle eut un petit sourire, conciliant afin de montrer qu’elle souhaitait jouer le jeu de “l’entente” du moins pour quelques temps et que cette réflexion n’était pas dans le but de le rabaisser. « Je t’avoue que je ne vois pas le bout de cette journée alors finir ça au plus vite me paraît assez plaisant. Je ne promets cependant pas d’être agréable et de ne pas dire ce que je pense si tu me cherches un peu trop. » Elle lui jeta un regard de défis afin de le prévenir. Elle pouvait être sympa. Elle ne l’avait simplement jamais été avec lui car il avait tout de suite été agressif dû à sa condition d’androïde et elle s’était jurée de ne plus se laisser faire - quand elle ne risquait pas de finir en rebus, evidemment. Et puis, Liam avait le don de faire ressortir son mauvais caractère. C’était comme s’il savait où appuyer pour faire mal, pour la faire sortir de ses gonds. C’était presque un talent à ce niveau-là - un talent nul, certes, mais un talent quand même. « Oui, j’étais sur les lieux au moment de l’explosion. Au début, tes collègues étaient presques bienveillants mais quand ils ont vu... » Elle s’interrompit, portant la main à son cercle de lumière sur sa tempe, alors qu’elle plongeait dans les souvenirs des visages horrifiés des policiers en se rendant compte qu’elle était une androïde. Elle s’était sentie tellement humiliée et blessée de leur réaction, comme si elle était née coupable dû à sa condition. Sa mâchoire se serra et elle baissa la main d’un coup, tournant son visage vers Jensen avant de plonger son regard dans le sien, le défiant de dire quoi que ce soit sur son moment de faiblesse. « Bref, en voyant que j’étais une androïde, ils m’ont arrêtée. » Elle balaya d’un geste de la main, qui ne tenait pas sa cigarette, son égarement passager. « J’étais simplement sortie acheter des cordes pour mon violon et celui de Charlotte, rien de plus. Tu peux même l’appeler si tu ne me crois pas. » Elle essayait vraiment de le respecter un tant soit peu mais le fait est qu’il aurait sûrement eu la même réaction que ses collègues vu son animosité pour son espèce et elle ne pouvait pas s’empêcher de douter de lui et d’être sûre qu’il ne la croirait pas sur parole. « Je ne sais pas trop si ce que j’ai vu pourrait t’apporter la moindre aide. Je me souviens vaguement de quelqu’un cri, puis d’autres cris qui le suivent et le bruit de l’explosion. Le souffle m’a envoyé valsé et avant que je ne puisse prononcer le moindre mot, on m’avait menottée comme si je n’étais qu’une vulgaire criminelle et pas une victime. » Elle prit un ton accusateur, montrant sa haine d’avoir été traitée ainsi. Elle n’avait rien fait. Elle n’avait même pas réussi à contacter les crimson riot alors pourquoi la traitait-on ainsi ? Parce qu’elle était une espèce différente ? Elle se demandait comment les humains avaient réussis à survivre et ne s’étaient pas encore entretués vu leur proportion à juger si vite tout ce qui était différent d’eux. Elle avala une nouvelle gorgée de café avant de finir sa cigarette et de l’écraser dans le cendrier situé au centre de la table. « D’autres questions ? » Elle attrapa sa tasse et croisa les bras, montrant que cette situation ne lui plaisait pas. Elle étendit à nouveau les jambes et toucha celles de son vis-à-vis. Elle eut un sursaut et les ramena vers elle afin de les croiser : pas besoin de continuer ce jeu stupide maintenant qu’ils avaient décidé de faire un effort.

« Merci pour le café et la clope. » Liam profita du silence pour boire une gorgée de café avant que Lennie ne lève ses poignets au niveau de son visage. « et aussi pour ça, tu n’étais pas obligé. » L’inspecteur haussa faiblement les épaules, l’air de dire que ce n’était pas grand-chose. Et puis c’était la moindre des choses surtout. Elle n’avait aucune raison d’être menottée.
Ouais, ses collègues allaient l’entendre sur ce coup là...

« Je vois que tu n’es pas le plus incompétent de ce service si tu n’étais même pas au courant que j’étais la suspecte sur l’enquête alors que tu en es en charge. » Liam ricana faiblement. Ouais, ça c’était sûr, ses collègues n’étaient pas des flèches. Heureusement qu’il y avait Zenia ou Siegfried pour rehausser le niveau. Et pourtant son collègue était un androïde c’était dire à quel point il trouvait ses autres collègues incompétents.

« Je t’avoue que je ne vois pas le bout de cette journée alors finir ça au plus vite me paraît assez plaisant. Je ne promets cependant pas d’être agréable et de ne pas dire ce que je pense si tu me cherches un peu trop. » Le brun la défia du regard pendant un moment, se retenant de sourire. « Je ne te promets rien non plus. Mais je vais essayer de me retenir. » Il ponctua sa phrase par un sourire amusé et prit une nouvelle gorgée de café, rapidement suivi par une taffe sur sa cigarette. « Oui, j’étais sur les lieux au moment de l’explosion. Au début, tes collègues étaient presques bienveillants mais quand ils ont vu... » Le regard de Liam s’assombrit au moment où Lennie pointa la puce sur sa tempe et il hocha faiblement la tête avec un regard désolé, montrant bien qu’il comprenait. Il n’aimait pas les androïdes, tout le monde le savait, mais il n’avait jamais arrêté l’un d’eux sans motif valable. Ses collègues par contre…
Il y avait une telle haine contre eux qui se développait qu’ils se faisaient arrêter pour n’importe quel motif. Et ce n’était pas ça qui changerait les mentalités. Loin de là.  
« Bref, en voyant que j’étais une androïde, ils m’ont arrêtée. » L’inspecteur hocha à nouveau la tête. « Je suis désolé. Je ferai en sorte qu’ils répondent de ce geste. » Sentant qu’elle allait lui rembarrer qu’il ne pouvait pas blairer les androïdes, il reprit rapidement. « Et je sais que je suis réputé pour ne pas vous porter dans mon cœur mais ça n’excuse en rien ce genre de comportement. » Il tira une nouvelle latte sur sa cigarette avant de reprendre. « Donc au nom de mes collègues, je m’excuse. » Ça ne changerait probablement rien à ce qu’elle devait ressentir, il s’en doutait, mais il estimait que c’était la moindre des choses de s’excuser.

« J’étais simplement sortie acheter des cordes pour mon violon et celui de Charlotte, rien de plus. Tu peux même l’appeler si tu ne me crois pas. » Il pianota rapidement sur sa tablette pour écrire ce que venait de lui dire Lennie et souffla un. « Je la contacterai si jamais il y a un doute sur ton témoignage. » Mais il se doutait bien qu’elle disait la vérité. « Je ne sais pas trop si ce que j’ai vu pourrait t’apporter la moindre aide. Je me souviens vaguement de quelqu’un cri, puis d’autres cris qui le suivent et le bruit de l’explosion. Le souffle m’a envoyé valsé et avant que je ne puisse prononcer le moindre mot, on m’avait menottée comme si je n’étais qu’une vulgaire criminelle et pas une victime. » Liam nota le ton agressif qu’elle avait employé mais préféra ne pas relancer la jeune femme là dessus. Ça n’amènerait rien de bon de toute façon. Il se contenta donc de hocher une énième fois la tête et de reporter ce qu’elle venait de lui dire sur sa tablette. Ils n’allaient pas aller bien loin avec ça…

« D’autres questions ? » Le flic releva les yeux vers l’androïde et l’observa un moment, cherchant ce qu’il pourrait lui poser comme questions mais fut tiré de sa réflexion quand il sentit la jambe de la jeune femme le frôler une nouvelle fois. Il remarqua le sursaut qu’elle eut mais ne fit aucune réflexion, préférant garder ses traits d’humours pour lui.
Après tout, ils avaient bien dit qu’ils enterreraient la hache de guerre le temps de cet entretien.

Le brun laissa passer un moment, le temps de terminer sa cigarette, puis reporta son attention sur Lennie. « Encore une fois, je suis désolé qu’ils t’aient traitée comme ça. Ils n’auraient pas du. Je ferai en sorte qu’ils… Apprennent de cette erreur ? » Il lui offrit un léger sourire avant de reprendre rapidement. « Donc tu n’as pas vu qui aurait pu poser cette bombe ? Personne en train de s’enfuir ou de se planquer ? » Si elle n’avait effectivement rien vu ils n’allaient pas aller bien loin. « Et dans les cris que tu as entendu, est ce que tu as entendu un nom, quelque chose qui pourrait nous diriger vers le responsable ? » Ils ne pouvaient se reposer que sur elle. Les caméras avaient été désactivés quelques minutes avant l’explosion ou bien avaient été détruite par le souffle. Tout ce qui pouvait leur amener des informations, c’étaient les témoignages. Et s’ils étaient tous aussi détaillés que celui de Lennie ils ne s’en sortiraient jamais.
Putain il détestait se sentir aussi impuissant.

Il poussa un soupir dépité et se passa plusieurs fois une main dans ses cheveux. « Est ce que… » Il ne savait vraiment pas ce qu’il pouvait poser comme question constructive si elle n’avait vu personne. Il ferait tout aussi bien de la laisser partir tout de suite. « Est ce que tu as vu d’autres androïdes sur place ? Il n’y a que des humains parmi les victimes. Alors ça nous semble plus plausible que ce soit le Crimson Riot qui soit derrière tout ça. Et puis il n’y a qu’eux qui utilisent ce mode opératoire. » Il se sentait tellement inutile à poser des questions aussi débiles...

Un blanc s’installa entre eux et Lennie se dandina sur sa chaise, mal à l’aise. Allait-il parler ? Ce silence commençait à lui porter sur les nerfs et elle savait qu’elle ne tarderait pas à ouvrir sa grande gueule afin de désamorcer la situation : pas forcément de la bonne manière mais elle n’en connaissait pas d’autres avec lui. Une fois que sa cigarette fut terminée, il prit la parole. « Encore une fois, je suis désolé qu’ils t’aient traitée comme ça. Ils n’auraient pas du. Je ferai en sorte qu’ils… Apprennent de cette erreur ? » Il lui offrit un léger sourire qui la mit encore plus mal à l’aise. Elle n’avait pas l’habitude de le voir ainsi et elle ne savait pas comment réagir par rapport à ça. S’ils avaient été dans une situation normal, elle lui aurait forcément envoyé une pique du genre “qu’est-ce que t’as ? Tu fais un AVC ou quoi ?” mais là ? Elle se sentait un peu perdue face à tout ça. « Donc tu n’as pas vu qui aurait pu poser cette bombe ? Personne en train de s’enfuir ou de se planquer ? » Elle plongea dans ses souvenirs, posant son regard sur la table. Elle se souvenait vaguement d’un homme qui l’avait bousculé avec hâte. Elle se souvenait encore du juron qu’elle avait poussé. Est-ce que ça pouvait être lui ? Elle ne savait pas mais l’homme avait l’air d’être pressé de partir… Elle réfléchit un peu plus et ne put dire s’il était un androïde ou pas. Elle tiqua à sa réflexion : pourquoi était-ce la première idée qui lui venait en tête ? Avait-elle si peu foi en ses congénères pour penser que l’un d’eux aurait pu faire ça ? Elle soupira. Devait-elle en faire part à Liam au risque de le conduire sur une mauvaise piste ?

« Et dans les cris que tu as entendu, est ce que tu as entendu un nom, quelque chose qui pourrait nous diriger vers le responsable ? » Elle n’avait rien entendu. Rien du tout. Elle se souvenait juste du bruit de l’explosion, de ses oreilles qui sifflaient, des cris - tellement de cris - et des gémissements d’agonie. Elle ferma les yeux, retenant les images de ces corps carbonisés qui lui revenaient en tête. Sa respiration s’accéléra et elle posa lentement la tasse sur la table alors que ses poings se serraient, enfonçant ses ongles dans ses paumes afin de se ramener à la réalité. Arriverait-elle à oublier tout ça ? Elle n’entendit même pas le soupir dépité de Liam, toujours plongé dans ses souvenirs. « Est ce que… » Un silence. « Est ce que tu as vu d’autres androïdes sur place ? Il n’y a que des humains parmi les victimes. Alors ça nous semble plus plausible que ce soit le Crimson Riot qui soit derrière tout ça. Et puis il n’y a qu’eux qui utilisent ce mode opératoire. » À l’évocation des Crimson Riot, elle reprit prise dans la réalité, se reconcentrant sur son discours. Elle murmura, plus pour elle-même que pour lui, ses yeux toujours concentré sur la table. Elle ne savait même pas s’il allait l’entendre. « Est-ce qu’on arrive à se remettre de ce genre d’évènements ? » Elle releva les yeux, plongeant dans celui de son vis-à-vis. « Est-ce qu’on arrive à oublier les cadavres qu’on a vu ? Arrive-tu à les oublier ? » Elle sentit ses yeux la brûler et elle cligna plusieurs fois des yeux, essayant de faire disparaître les larmes qui montaient. Elle savait qu’il avait vu plus de cadavres qu’elle. Elle était une novice dans la matière et elle entendit une petite voix dans sa tête lui murmurer que si elle n’était pas capable de supporter ça, comment pourrait-elle faire partie des crimson riots ? Elle reposa ses yeux sur sa tasse, l’entourant de ses mains avant d’en boire une gorgée. Elle ne savait si elle avait la force de continuer tout ça. Ça l’obligeait à repenser à ses pauvres âmes qui avaient juste été coupables d’être là au mauvais moment au mauvais endroit.

« Merci de t’occuper d’eux. Je sais que certains policiers ont des aprioris et je sais que tu en as aussi mais nous ne sommes pas tous des montres. Je- » Elle posa sa main sur sa poitrine. « -ne suis pas un monstre. Je ressens des choses, j’ai de l’empathie pour les gens et on a une conscience. » Elle insista sur ce dernier mot, essayant de lui faire comprendre. C’était sûrement la première fois qu’elle lui parlait à coeur ouvert de tout ça. « Je sais que tu me hais à cause de ma condition mais je n’ai pas demandé à être comme je suis. » Elle plongea son regard dans celui de Liam. « Nous aussi, nous sommes humains au fond, même si ce n’est pas biologiquement parlant. » Elle poussa un soupir et se reconcentra sur les questions de Liam, réfléchissant à ce qu’il avait demandé car ce n’était clairement pas le moment pour lui faire un discours sur les androïdes. De toute façon, elle savait très bien qu’elle n’arriverait pas à le faire changer d’avis comme ça. « Je me souviens d’un homme… Honnêtement, je ne sais pas si c’est lui mais il m’a paru bizarre. » Elle passa sa main dans ses cheveux, frustrée d’être aussi inutile. « Il s’est cogné à moi en partant de l’endroit où la bombe était. Je ne sais pas s’il venait précisément de l’endroit où était la bombe mais voilà… Il avait l’air pressé de partir de là. » Elle haussa les épaules, tournant la tasse entre ses mains qui étaient devenues moites. « Je ne saurais te dire si je c’était un androïde ou non, je n’ai franchement pas fait attention. J’ai surtout fait en sorte de me retenir de l’insulter. » Elle eut un petit sourire et l’une de ses mains se dirigea automatiquement vers l’épaule qui avait été bousculé, se souvenant de l’évènement. Elle croisa ses jambes, observant son vis-à-vis. « Je peux essayer de le décrire, si tu veux. » Elle pencha la tête sur le côté, dans l'attente de sa réponse.

Il était en train de se demander si ça valait vraiment la peine qu’il la garde pour le moment. Elle semblait encore sous le choc -ce qui était tout à fait normal- mais en plus de ça elle ne semblait pas pouvoir lui donner plus d’indications que ça.

« Est-ce qu’on arrive à se remettre de ce genre d’évènements ? » Il quitta sa tablette des yeux, accrochant le regard de Lennie. « Est-ce qu’on arrive à oublier les cadavres qu’on a vu ? Arrive-tu à les oublier ? » Il vit ses yeux s’embuer et elle cligna plusieurs fois des paupières, sans doute pour essayer de ne rien laisser transparaître.
Ouais.
Elle était vraiment touchée par ce qu’elle avait vécu.
Liam baissa à son tour la tête en soupirant faiblement. « On n’arrive pas à les oublier non. » Ça ne servait à rien de lui mentir. Elle s’en rendrait compte bien assez tôt de toute façon. « Au mieux, on arrive à s’y habituer, à ne pas trop s’attarder dessus et à rapidement passer à autre chose. » Il y arrivait plutôt bien, à faire abstraction et à passer à autre chose rapidement. Sauf pour deux d’entre eux.

« Merci de t’occuper d’eux. Je sais que certains policiers ont des aprioris et je sais que tu en as aussi mais nous ne sommes pas tous des montres. Je- » La voix de la jeune femme le tira de ses pensées et il suivi sa main du regard quand elle la leva pour la poser sur sa poitrine. « -ne suis pas un monstre. Je ressens des choses, j’ai de l’empathie pour les gens et on a une conscience. » Il hocha faiblement la tête, se contentant de souffler un simple. « Je sais. » Il avait eu ce déclic, cette révélation quand il avait assisté à la mise à pieds de Siegfried. C’était quand il l’avait vu pleurer qu’il avait réalisé qu’ils n’étaient pas tous comme les monstres qui lui avaient pris sa femme et sa fille. Il avait encore du mal à les considérer comme humains mais comprenait qu’ils étaient aussi doués d’émotions. Qu’ils pouvaient ressentir les mêmes choses qu’eux.

« Je sais que tu me hais à cause de ma condition mais je n’ai pas demandé à être comme je suis. » Le regard de l’inspecteur se fit plu perplexe. C’était bien la première fois qu’elle lui parlait comme ça. Dans un autre contexte elle l’aurait sans doute insulté mais aujourd’hui c’était différent. « Nous aussi, nous sommes humains au fond, même si ce n’est pas biologiquement parlant. » Il souffla à nouveau un. « Je sais. » D’une petite voix. « Je l’ai réalisé il y a quelques années. »


« Je me souviens d’un homme… Honnêtement, je ne sais pas si c’est lui mais il m’a paru bizarre. » Liam fronça légèrement les sourcils avant de pianoter rapidement sur sa tablette et encouragea dans la foulée la jeune femme à continuer d’un regard. « Il s’est cogné à moi en partant de l’endroit où la bombe était. Je ne sais pas s’il venait précisément de l’endroit où était la bombe mais voilà… Il avait l’air pressé de partir de là. » Il nota les informations qu’elle venait de lui donner, réfléchissant déjà à l’emplacement des caméras de la zone pour savoir laquelle il pourrait essayer d’utiliser pour identifier le type. Si les caméras étaient encore utilisables, ce dont il doutait. « Je ne saurais te dire si je c’était un androïde ou non, je n’ai franchement pas fait attention. J’ai surtout fait en sorte de me retenir de l’insulter. » Il lui fit un léger signe de tête, lui montrant bien que ce n’était pas grave. Rien que ce qu’elle venait de lui dire pourrait grandement l’aider. « Je peux essayer de le décrire, si tu veux. »

Liam se renfonça dans son siège, appuyant son dos contre le dossier en soupirant. Est ce que ça servirait vraiment à quelque chose qu’elle le lui décrive ? Ce serait sans doute mieux qu’elle regarde les bandes des caméras sur place -si elles étaient utilisables- avec lui pour essayer de le reconnaître.
Il sortit une clope de son paquet pour la prendre en bouche et invita Lennie à se servir si elle le souhaitait avant de l’allumer et de tirer une latte dessus. « Honnêtement je ne sais pas. » Il fait tomber la cendre de sa cigarette dans le cendrier avant de reprendre, sans lâcher Lennie des yeux. « Tu as subi un traumatisme assez grave en assistant à ça, sans compter ce que mes… Collègues t’ont fait subir. Je ne sais pas si ce serait une bonne idée que tu te remémores tout ça maintenant. » Il poussa un nouveau soupir tout en se massant les paupières de sa main libre. « Si tu te sens capable de le faire, de me donner quelques infos sur ce type, comme sa taille, ce qu’il portait comme vêtements, ça pourrait grandement m’aider. Maintenant… » Il fit un sourire se voulant rassurant à la jeune femme. « Je ne te force à rien. C’est à toi de voir. Et dans le pire des cas, je compte visionner les vidéos des caméras de surveillance de la zone pour essayer de voir si je peux en tirer quelque chose. Si tu ne veux pas le faire aujourd’hui, je te recontacterai dès que j’aurai les bandes pour que tu viennes les regarder et on les analysera ensemble. » Il tira une nouvelle latte sur sa clope. « On fait comme tu le sens. »

Il baissa la tête en soupirant faiblement et elle l’observa, attentive. C’était peut être bête de sa part mais elle attendait une vraie réponse. Elle savait qu’il avait plus de cadavres qu’elle, sûrement plus qu’elle n’en verrait jamais, et sûrement naïvement, elle espérait qu’il puisse lui donner des moyens de ne pas cauchemarder chaque fois qu’elle y repenserait. « On n’arrive pas à les oublier non. » Le coeur de Lennie se serra face à ce constat. Elle aurait tellement voulu oublier. Elle aurait tellement voulu ne pas avoir assister à tout ça. Il aurait juste fallu qu’elle retarde son achat juste d’une vingtaine de minutes, une demi-heure, ce n’était pas grand chose dans une vie mais, apparemment, ça pouvait faire une grande différence. « Au mieux, on arrive à s’y habituer, à ne pas trop s’attarder dessus et à rapidement passer à autre chose. » Elle hocha rapidement de la tête. C’était mieux que rien, non ? Il faudrait qu’elle se concentre, qu’elle essaye de se changer les idées quand elle repensera à ces corps carbonisés, à ces chairs en décomposition mais, surtout, à oublier que ces gens étaient des personnes qui avaient eu une vie, que venaient sûrement juste là afin de faire des achats. Quand elle avait remarqué qu’une petite fille était dans les victimes, elle avait senti un haut-le-coeur la prendre. Ses cheveux blonds, noircis par l’explosion, son visage méconnaissable et sa petite main qui tenait encore une poupée en chiffon… Tous ces éléments lui revenaient mémoires, lui rappelant Charlotte sur les photos qu’elle avait vu d’elle, enfant. Elle prit une grande inspiration, essayant d’oublier tout ça. Si cette action était dû aux Crimson Riot, arriverait-elle à les rejoindre ? Elle n’en était plus sûre. Elle ne voulais pas participer à ce genre d’actions. Le genre d’action qui menait à la mort de personnes innocentes qui, peut être, soutenaient les androïdes à leur manière.

Quand elle lui parla de sa condition, quand elle lui dit enfin ce qu’elle avait sur le coeur concernant sa haine des androïdes, elle vit qu’il était touché - bien plus que ce qu’elle aurait pensé en fait. Ça la perturba. Elle cligna plusieurs fois des yeux avant qu’il ne prenne la parole. « Je sais. » Elle releva la tête alors qu’il reprenait la parole d’une petite voix. « Je l’ai réalisé il y a quelques années. » Était-il sérieux ? Ou se fichait-il d’elle ? Mais… Il avait l’air tellement sincère. Elle sentit son sang battre à ses tempes à cause de son coeur qui s’était accéléré d’un coup. Elle ne savait pas si c’était à cause de la colère de voir qu’il s’en était rendu compte et pas à cause d’elle et du traitement qu’il lui faisait subir - était-ce de la jalousie ? Elle ne savait pas - ou bien parce que le voir aussi… presque “fragile” ou, en tout cas, vulnérable la perturbait, accélérant les battements de son coeur. Elle prit une grande respiration, raclant sa gorge afin de se concentrer sur le témoignage qu’elle devait lui donner. Il acquiesça à chacune de ses paroles, fronçant les sourcils parfois, prenant des notes d’autres fois. Il ne l’interrompit pas et c’était peut-être mieux ainsi. Elle voulait tout dire d’une traite : ces souvenirs ne la faisaient pas se sentir bien. Même si elle lui disait qu’elle pouvait le décrire - ou, en tout cas, essayer - elle ne savait pas si elle en serait capable.

Le soupir qu’il laissa échapper ramena son attention sur lui alors qu’il se renfonçait dans son siège. Qu’est-ce qui pouvait bien lui passer par la tête ? Avait-elle été un tant soit peu utile ? Il sortit une clope de son paquet pour la prendre en bouche et l’invita à s’en servir une si elle le souhaitait. Elle lui fit un signe de tête, reconnaissante, et ne se rendit compte que ses mains tremblaient que quand elle essaya d’attraper une cigarette. Elle batailla quelques instants avant de reposer le paquet, ferma, ouvrit, referma et rouvrit ses mains à plusieurs reprises afin de cesser ses tremblements. Une fois que ce fut fait, elle attrapa avec empressement une cigarette et tira une latte, soulagée de pouvoir au moins trouver un exutoire dans cette connerie. Elle savait que ce n’était pas nocife pour elle, quoique peu conseillée, et elle n’en était pas accro mais c’était devenu comme une espèce de geste mécanique. Elle s’en contentait pour se soulager du stresse. Elle côtoyait sûrement trop les humains… Elle prenait leur pire défaut mais également leur qualité. Elle était sûre qu’avant - au tout début - elle aurait été incapable d’être aussi compatissante avec tous ces morts. Ce n’était pas une mauvaise chose de vivre avec eux. Ça lui permettait de ne pas devenir une machine sans sentiments, un monstre. Était-ce pour ça que certains androïdes devenaient dit “sauvages” ? Perdaient-ils leur humanité à force de ne plus côtoyer les humains ? Était-ce leur programme qui faisait d’eux ce qu’ils étaient et les humains ne leur permettaient juste d’appliquer ce dernier ou bien s’amélioraient-ils chaque jour en vivant avec eux ? Elle secoua la tête : ce n’était vraiment pas le moment de se poser ce genre de questions. Et puis, qu’est-ce que ça pouvait bien lui faire que ce soit la première théorie ou la deuxième ? Elle ne voulait pas changer ce qu’elle était. La voix de Liam la ramena sur Terre. « Honnêtement je ne sais pas. » Hein ? Quoi ? Ah oui. La description. Il fit tomber la cendre de sa cigarette dans le cendrier avec de reprendre ne la lâchant pas des yeux. Elle se sentit un peu mal à l’aise face à cette observation et elle ne savait pas pourquoi mais préféra laisser passer, attendant la suite du discours de son vis-à-vis. « Tu as subi un traumatisme assez grave en assistant à ça, sans compter ce que mes… Collègues t’ont fait subir. Je ne sais pas si ce serait une bonne idée que tu te remémores tout ça maintenant. » Il poussa un nouveau soupir tout en se massant les paupières de sa main libre. Lennie n’en croyait pas ses oreilles. Elle avait passé des années avec cet homme et c’était bien la première fois qu’il la traitait comme si elle était vraiment une… personne et pas seulement un amas de câbles et de fils. Elle ne savait vraiment plus sur quel pieds danser avec lui. Devait-il le remercier d’enfin la traiter comme une personne lambda ou bien lui hurler dessus afin de lui demander pourquoi ? Jusqu’ici, il avait essayé d’êtr “courtois” vu que c’était dans le cadre de son travail mais c’était bien la première fois qu’il faisait presque preuve d’empathie envers elle. Avant qu’elle n’ait pu réagir, il avait repris la parole. « Si tu te sens capable de le faire, de me donner quelques infos sur ce type, comme sa taille, ce qu’il portait comme vêtements, ça pourrait grandement m’aider. Maintenant… » Il lui fit un sourire, voulant la rassurer mais le corps de cette dernière se tendit. Elle ne savait pas comment réagir face à cette toute nouvelle gentillesse alors elle préférait rester sur ses gardes, de peur que tout disparaisse d’un claquement de doigt. « Je ne te force à rien. C’est à toi de voir. Et dans le pire des cas, je compte visionner les vidéos des caméras de surveillance de la zone pour essayer de voir si je peux en tirer quelque chose. Si tu ne veux pas le faire aujourd’hui, je te recontacterai dès que j’aurai les bandes pour que tu viennes les regarder et on les analysera ensemble. » Il tira une nouvelle latte sur sa clope. « On fait comme tu le sens. » Elle acquiesça, reconnaissante de lui laisser le choix.

Elle garda le silence, observant la fumée de sa cigarette voleter dans les airs. Elle avait envie de partir, loin et d’oublier ce qu’elle avait vu. Elle avait envie de voir Charlotte et de la serrer contre elle pour oublier, rien qu’un instant tout ce qu’elle avait vu mais… Elle ne pouvait pas s’empêcher de penser que vouloir faire ça était égoïste. Elle repensa à cette petite fille blonde, celle qui ressemblait tellement à son amie. Serait-elle lâche de ne pas prendre ses responsabilités maintenant et de ne pas vouloir continuer cet entretien ? Elle secoua la tête. Non… C’était peut être mieux qu’elle ait les idées claires quand elle le ferait. Après tout, elle n’était sûrement pas capable de bien se souvenir de l’homme maintenant. Elle revoyait beaucoup trop les victimes plutôt que lui. Elle poussa un soupir avant de tirer une latte sur sa cigarette. Oui, c’était peut-être mieux. « Honnêtement… Je préfèrerais ne pas continuer cet entretien… Je ne sais pas si j’en suis capable. » La main qui ne tenait pas sa clope se serra. Elle détestait montrer ainsi sa faiblesse à Liam. Elle savait qu’ils avaient enterré la hache de guerre pour un instant mais, au fond, elle savait que ça ne durerait pas. Elle ne savait d’ailleurs pas comment elle réagirait la prochaine fois qu’il l’appellerait “tas de ferrailles”. Elle avait l’impression qu’ils avaient passé un cape durant cet interrogatoire mais était-ce seulement elle ? « Je... » Elle tira une nouvelle latte qu’elle laissa sortir. Puis, elle avala difficilement sa salive. « Je ne peux pas m’empêcher de me souvenir de cette petite fille… Ses cheveux blonds… Ils me rappellent Charlotte. » Elle plongea son regard dans le sien. Elle était tellement faible, putain. Elle se pensait plus forte que ça, apparemment elle avait tort. Elle écrasa sa cigarette d’un geste brusque dans le cendrier avant de resserrer ses bras autour d’elle, évitant le regard de Liam. « Il serait peut-être plus sage que j’attende quelques jours. Il faut que j’arrête de revoir toutes ces vict... tous ses corps. » Elle se reprit au dernier moment. Elle ne voulait pas penser à eux comme des victimes, c’était bien trop dur. Mais parler d’eux comme étant des corps, c’était bien plus facile. Ainsi, ils ne représentaient pas des personnes, des familles détruites, des avenirs foutus en l’air… etc. Ils ne représentaient que des choses vides. Elle essayait de se convaincre de ça. C’était plus facile ou, du moins, le croyait-elle. Elle poussa un soupir et replongea son regard dans celui de Jensen. « Je sais que tu me laisses le choix mais… Tu t’y connais mieux que moi : qu’est-ce qui t’aiderait le plus ? Quel est, selon toi, le meilleur moment pour donner mon témoignage ? Tu n’as pas peur que si on repousse tout ça, j’oublie des éléments ? » C’était techniquement impossible avec sa mémoire électronique mais un accident était vite arrivé et elle en avait eu la preuve il n’y a même pas quelques heures. « J’ai peur de faire une erreur… J’ai peur de ne pas dire ce que je sais au bon moment et ce serait... » Elle retint difficilement un sanglot. Foutue gamine… Pourquoi était-elle là ? Elle n’aurait pas pu être à l’école ? Chez une de ses amies ? « J’aurais l’impression de laisser tomber les victimes de cet accident. » Dire ces mots lui faisait mal. Elle attrapa une nouvelle cigarette et l’alluma. Juste oublier quelques instants, c’était tout ce qu’elle voulait même si elle savait que la réalité lui reviendrait en plein visage bien plus violemment après.

Liam attendait de voir la réponse de la jeune femme en tirant silencieusement sur sa cigarette. Il ne voulait pas la brusquer. Elle avait déjà subit un traumatisme en assistant à ce massacre. Il se doutait bien que ce ne serait pas forcément une bonne idée de lui demander de tout lui décrire dès maintenant. Mais d’un autre côté, s’il lui laissait quelques jours pour se remettre de ses émotions elle risquait d’oublier certains détails. Dans les deux cas, ça pouvait poser problème.
Est ce qu’il aurait laissé ce choix si ça avait été une inconnue en face de lui et pas Lennie ? Il n’en savait rien.

« Honnêtement… Je préfèrerais ne pas continuer cet entretien… Je ne sais pas si j’en suis capable. » Liam quitta sa tablette des yeux pour les poser sur la jeune femme. « Je... » Il garda le silence, préférant la laisser continuer à son rythme pour ne pas risquer de la brusquer. « Je ne peux pas m’empêcher de me souvenir de cette petite fille… Ses cheveux blonds… Ils me rappellent Charlotte. » Il soutint son regard quand elle le plongea dans le sien et se contenta de faiblement hocher la tête. Il comprenait parfaitement ce qu’elle ressentait.

« Il serait peut-être plus sage que j’attende quelques jours. Il faut que j’arrête de revoir toutes ces vict... tous ses corps. » Est ce qu’elle essayait déjà de prendre du recul en les appelants des corps plutôt que des victimes ? Ça y ressemblait en tout cas.
« Je sais que tu me laisses le choix mais… Tu t’y connais mieux que moi : qu’est-ce qui t’aiderait le plus ? Quel est, selon toi, le meilleur moment pour donner mon témoignage ? Tu n’as pas peur que si on repousse tout ça, j’oublie des éléments ? » L’inspecteur cligna plusieurs fois des yeux, surprit par ces questions. Elle lui demandait son avis ? A lui ? Décidément, cet entretien était plein de surprises. « J’ai peur de faire une erreur… J’ai peur de ne pas dire ce que je sais au bon moment et ce serait... » Sa mâchoire se crispa quand il la vit retenir un sanglot et il baissa un moment les yeux. « J’aurais l’impression de laisser tomber les victimes de cet accident. » Le regard toujours baissé, il la vit du coin de l’œil attraper une nouvelle cigarette de son paquet. Il se rappela qu’il avait toujours la sienne coincée entre ses doigts et l’écrasa dans le cendrier quand il réalisa qu’elle s’était complètement consumée.

Qu’est ce qu’il était censé faire ? Comment est ce qu’il devait gérer cette situation ? Son devoir lui disait de prendre immédiatement son témoignage sans se soucier de ce que Lennie pouvait ressentir, comme n’importe quel témoin. Encore que, la plupart des témoins avaient droit à un soutien psychologique. Ce qui visiblement ne s’appliquait pas aux androïdes.
Elle ne semblait absolument pas en état de faire ce témoignage. Rien que le fait d’évoquer ce qu’elle avait vécu semblait déjà la pousser à bout.
Ce ne serait pas… Non. Ce n’était pas raisonnable de lui demander ça maintenant. Si elle se mettait à craquer en plein milieu, ça ne les avancerait à rien.

Liam pianota à nouveau sur sa tablette et la coupa avant de la faire glisser sur sa droite, jusqu’au bord de la table. Il prit ensuite une grande inspiration et releva les yeux vers Lennie. « Je te l’ai dit Lennie, c’est à toi de voir si tu te sens en état où pas. C’est toi qui as le dernier mot. Mais si tu veux vraiment mon avis… » Il baissa instant son regard. « Je ne pense pas que ce soit une bonne idée de te demander ça maintenant. » Il lui offrit un sourire se voulant rassurant. « Tu es encore en état de choc et sans douter de tes capacités, j’ai peur que tu mélanges les informations en te remémorant tout ça. » Il valait mieux qu’ils ne prennent aucun risque.

« Rentres chez toi d’accord ? Prends un bain, écoutes de la musique, lis un bouquins ou vois des gens. Je ne sais pas mais… Vides toi la tête, essaies de penser à autre chose. » C’était bien plus facile à dire qu’à faire, il le savait mais c’étaient les meilleurs conseils qu’il pouvait lui donner. « Prends quelques jours pour évacuer tout ça. Et quand tu te sentiras prête, appelles moi. » Il se releva lentement de la table et se marcha jusqu’à l’interphone près de la porte. « Ici Jensen, j’en ai terminé avec le témoin. Que quelqu’un l’escorte chez elle. » Il tourna un instant la tête vers Lennie, lui faisant un léger sourire. « Et dîtes à Lloyd et à Marston que je les attends dans mon bureau. » Non, il n’avait pas oublié le comportement que ces deux abrutis avaient eu avec un témoin. Ils allaient l’entendre.

Il retourna tranquillement jusqu’à la table pour attraper la tablette et avisa un instant son paquet de clopes avant de le faire glisser jusqu’à Lennie. « Tu peux le garder. » Il l’invita à se relever et retourna à la porte pour l’ouvrir avant de se décaler légèrement pour laisser passer la jeune femme. Il attendit qu’elle soit à sa hauteur et souffla un. « Prends ton temps d’accord ? » Avant de hocher la tête.