a whole new world. [kevin]

Ça n’avait pas été une mince affaire, mais tu étais enfin à parvenu à faire sortir le petit Pelt de son antre. Ça faisait des mois que tu le tannais pour qu’il aille se dégourdir les pattes, mais le bougre dénichait toujours une excuse, une araignée à inspecter ou un livre d’images à finir. Jusqu’à aujourd’hui. L’événement était tel que tu avais feint un tournis, te rappelant vos chancelants débuts, et ton plan de génie.

Tu allais t’appliquer une nouvelle couche d’anticerne lorsque le reflet dans le miroir n’était visiblement pas le tien. Aussitôt, au vu des récits qu’on avait pu te raconter sur le phénomène récent (et donc en vogue) des clusters, un sourire étire ta bouche de poupée. Tu vas chercher ta soeur pour la prévenir, fier comme un paon de posséder enfin quelque chose qu’elle n’avait pas : un foetus de cluster.

Contrairement aux autres réseaux transcendantaux que tu connaissais, vous ne sembliez pas être très nombreux. Tu avais cru voir un troisième membre qui avait tôt fait de poser des barrières dans sa conscience, si bien qu’il ne s’agissait finalement plus que de toi, et de ce gamin de quinze ans.
Il n’avait pas l’air d’avoir compris ce qui lui était tombé sur le coin du nez. Et pour cause, à mesure que tu l’observais, tu comprenais que le garçon vivait complètement reclus chez lui. L’occasion était trop belle pour la laisser passer et de fait, tu te présentais à lui comme son ami imaginaire. Des années plus tard, il ne semblait toujours pas accoutumé à tes allées et venues intempestifs.

« Parti et revenu~ Pas de ma faute si tu ne peux pas te passer de moi, mon coco ! C’est pas tous les jours que j’arrive à te faire prendre la poudre d’escampette, alors crois-moi, je veux pas en rater une miette~ ! » Tu tapes fébrilement dans tes mains, fouinant un peu partout autour de vous, à l’affût de la moindre turbulence dans l’atmosphère, bien que tu sois incapable de repérer ce genre de phénomènes.

« Crois-moi, traverser cette brèche est certainement la meilleure chose qui puisse t’arriver ! » A t’entendre, on pourrait croire que tu ne craignais pas le moins du monde que le garnement atterrisse dans ta dimension et découvre ainsi que, loin d’être imaginaire, tu étais bel et bien palpable. Cela dit, tu ignorais combien de dimensions il pouvait y avoir, et cela signifiait donc que Pelt avait tout autant de chances de tomber ailleurs. Et, si par la même occasion, ça te permettait de voyager un peu, par projection interposée, tu n’allais pas cracher dessus.

Quant à ce qui pouvait arriver au garçon dont tu étais responsable, tu ne t’en souciais guère. Il avait l’air suffisamment à côté de ses pompes (qu’il avait d’affreuses en ce grand jour) pour qu’on n’ait envie de passer sur le trottoir d’en face en le voyant ainsi vagabonder.

Pas de trottoir à l’horizon, cela dit, ni aucune âme qui vive. Tu penches la tête vers lui, les bras croisés et le sourcil haussé. « Par contre t’es… genre sûr que tu sais où tu vas ? Nan parce que je suis peut-être dans ton imaginaire, mais il s’agirait pas que cette brèche y soit non plus… »