(#2) sydsyn + will we always be pretending?

Tamsyn déteste All Stars.
Elle a toujours détesté ce label.
Ce n’est pas que leurs artistes sont mauvais. La vérité, c’est qu’ils en ont même des plutôt bons. Ils seraient encore meilleurs si leur musique partait d’une proposition artistique personnelle, et pas d’un concept préfabriqué par un groupe de vieux mecs sexistes et de jeunes premiers beaucoup trop prétentieux. Tamsyn a toujours eu du mal à comprendre comment un label comme celui-ci pouvait toujours exister, en 2018. De bonnes campagnes de communication, probablement. Et des artistes payés pour mettre en avant leur label autant que possible, aussi. Ça l’a encore choquée ce soir, quand l’un de leur groupe est monté sur scène pour recevoir le prix de la chanson électro de l’année. On aurait dit que des instructions claires leur avait été données pour leur discours de remerciement. All Stars a au moins la chance que leurs artistes soient de très bons acteurs, et que la population lambda, qui ne connaît pas l’envers du décor, soit incapable de se rendre compte de l’hypocrisie.

Tamsyn déteste All Stars. Techniquement, elle ne les croise que quelques fois par an. Les cérémonies de remises de prix, les réunions annuelles des labels pour s’accorder sur les grands événements musicaux de l’année… Quelques soirées mondaines, de temps en temps. Elle se contente de les saluer, quand elle les croise. Les félicite avec un peu d’hypocrisie quand ils gagnent des prix… Elle a aussi assez de sang-froid pour se retenir de jouer à la plus conne quand ils descendent subtilement High Hopes dans les discussions. Le reste du temps, ils font leur vie, et les équipes d’High Hopes font la leur.
Et c’est très bien comme ça.

Mais si Tamsyn déteste autant All Stars, c’est probablement à cause de Richard “Dick” Alvares. Le mec le plus dégoûtant de tous les temps.
Quand elle est sortie de l’université, il l’a invitée au restaurant, et elle a fait l’erreur d’accepter, en pensant qu’il allait lui proposer un job. Elle le connaissait mal, à l’époque. Il a passé la soirée à la gonfler en parlant de son parcours brillant, de la liste longue comme le bras de célébrités avec qui il allait à des soirées… Il a un peu abusé de la bière, et parce qu’elle a eu l’élégance de ne pas s’enfuir, il a pensé que c’était une bonne idée d’essayer de fourrer sa langue dans la sienne. Tamsyn classe sans mal cette soirée comme l’une des pires de sa vie. Elle n’a jamais trop raconté ça, parce qu’on l’aurait probablement accusée de vouloir “ternir la réputation du bras-droit d’All Stars”. C’était bien la dernière chose dont elle avait besoin : une mauvaise pub au moment de lancer sa propre entreprise. Mais elle n’a jamais oublié. Et franchement, elle aurait été ravie d’oublier, si le gars n’avait pas continué à la saouler, soirée après soirée, mois après mois, année après année.

Mais voilà le truc : Dick Alvares n’arrête jamais.
À chaque fois que High Hopes et All Stars se retrouvent aux mêmes événements, il se fait un plaisir de venir, de la coller toute la soirée, et de lui dire qu’elle peut toujours les rejoindre si elle en a envie. De temps en temps, il lui glisse son numéro de téléphone (encore) ou le numéro de sa chambre d’hôtel, avec un clin d’oeil qui lui donne envie de vomir.
Pour l’harmonie du monde musical, et surtout pour préserver sa réputation, elle se contente de sourire, de le saluer, avant de jeter ses petits mots et de grimacer dés qu’il n’est plus dans son champ de vision.
À chaque fois, elle se prépare psychologiquement avant d’aller à ces soirées. À chaque fois (et c’est de loin le plus triste), elle choisit avec attention sa tenue pour éviter que le regard de ce gars ne se balade trop sur ses jambes ou sa poitrine. C’est de loin le truc dont elle est le moins fière. Comment ne pas avoir honte de choisir ses fringues en fonction d’un homme, de s’écraser, alors qu’on la présente comme symbole de l’empowerment des femmes et de la jeunesse dans les magazines ? Ça la débecte. Mais elle le fait, parce qu’elle veut l’éviter autant que possible.

Mais même avec une robe longue, noire, sans décolleté, elle a senti le regard du brun dans sa nuque tout au long de la cérémonie. Alors quand les projecteurs s’éteignent dans la salle de spectacle, et que toutes les équipes des labels sont invitées à rejoindre la salle de réception pour le cocktail, elle n’a juste pas envie d’y aller.
Ce soir, High Hopes a raflé huit awards. C’est plus qu’All Stars. C’est plus que les autres années, aussi. Alors forcément, elle a envie de fêter ça. Elle a envie de célébrer, et de ne pas laisser un gros lourd gâcher sa soirée. Mais elle peut déjà parier qu’il va trouver le moyen de lui gâcher son plaisir, d’une manière ou d’une autre.
Alors quand ils arrivent dans la salle, et qu’on leur tend du champagne, elle se cramponne à la manche de Sydney. « Me laisse pas toute seule, s’il te plait. » Elle se rend compte qu’elle a dit ça d’un drôle de temps, alors avant qu’il puisse lui demander pourquoi, elle ajoute : « Je pense que c’est mieux si on reste ensemble, pour saluer les gens. Plutôt qu’ils aient à venir nous voir tous les deux à tour de rôle. C’est chiant pour tout le monde, nan ? Autant qu’on reçoive les compliments ou les remarques passives-agressives ensemble, nan ? » D’habitude, ils ont tendance à se séparer, lors des réceptions, pour parler au plus de gens possible. Mais là, hors de question qu’elle se laisse embarquer par Dick dés le début de la soirée. Et il n’osera probablement pas venir la draguer franchement si quelqu’un est avec elle. Du moins elle l’espère. Parce qu’il n’y aurait rien de plus humiliant que voir ce débile lui faire des avances aussi pourries que d’habitude devant quelqu’un. Surtout Syd. Jusqu’à maintenant, ce n’est jamais arrivé. Tamsyn a toujours fait en sorte que Sydney ne se rende pas trop compte du manège de Dick, en grande partie parce qu’elle a honte du fait qu’elle n’a pas été capable de s’en débarrasser elle-même.

Des sourires hypocrites et un peu trop de champagne étaient généralement ce qu’il fallait à Sydney pour qu’il puisse apprécier ce genre de soirées. Ça sonne un peu ingrat, pauvre Syd qui doit se taper une soirée un peu longue avec des gens un peu chier pour récolter les fruits de son succès et ça l’est, il le sait bien. Après avoir passer des années plongé dans ce milieu et après s’y être quelque peu perdu, Sydney connait le système, sait comment il fonctionne, sait qui doit être Sydney Hudson en ces moments là. Sydney Hudson l’alias, Sydney Hudson l’homme d’affaire, avec scrupules certes, mais businessman tout de même, celui qu’on appelle  Monsieur et à qui on sert là main avec vigueur, l’un des H de High Hopes, la moitié du duo gagnant de cette soirée. Huit awards, c’est plus que jamais et plus que leur concurrent direct. Et c’est sans doute cette pensée qui rendra la soirée plus douce. Sydney n’a jamais été quelqu’un d’ouvertement compétitif, même si dans ce milieu c’est une nécessité, mais il ne peut garder la part mesquine de sa personne, habituellement bien cachée au fond de son âme de se réjouir à la vue des réactions de l’équipe d’All Stars, et surtout celles de leur leader.

Dick Alvares n’a jamais vraiment porté grande attention à Sydney, et pour cause, il était toujours concentré sur son acolyte, sur Tamsyn, comme le gros beauf détestable qu’il est. Dick porte bien son nom, personne ne peut le nier. C’est un homme de pouvoir, un homme qui a l’habitude d’avoir le monde, et surtout la population féminine à ses pieds, pas pour sa beauté ou sa merveilleuse personnalité, Syd en est sur. C’est pourquoi le voir est toujours une expérience intéressante. Au début, il n’avait pas vraiment remarqué comment Dick se comportait avec Tamsyn, trop occupé de son côté, pourtant après quelques minutes d’observation lors d’un évènement, il avait pu voir l’inconfort de la jeune femme et depuis ce jour-là, c’est comme s’il était programmé pour le ressentir. Il n’avait jamais osé intervenir, sachant que Tamsyn n’avait besoin de personne pour se défendre, mais aussi et surtout parce qu’il ne voulait pas devenir comme Dick, un homme sans gêne qui pense avoir son mot à dire sur ce que font les femmes de son entourage ou qui pense avoir une espèce de mission donnée par le dieu de la testostérone pour jouer au sauveteur. Il s’était donc contenté de rester dans son coin, et d’exercer une poignée de main virulente, qu’il espérait douloureuse lorsque les deux hommes se saluaient.

Pourtant ce soir là, Tammy semblait vouloir rester à ses côtés, et Syd se doutait bien des raisons qui se cachaient derrière son attitude, même si elle n’en disait rien.

« Oui, oui, t’as raison, mieux vaut subir ça à deux, hein ? », dit-il avec un sourire, avant de lui tendre sa main en signe d’encouragement. La réception battait son plein alors qu’ils divaguaient entre les différents groupes de personnes, acceptant les compliments et les remarques, et faisant la conversation tout en sirotant une coupe de champagne. La fille de Monsieur Roberts allait se marier, celle de Monsieur White avait mystérieusement disparu et il ne semblait pas disposé à en parler, pourtant, les rumeurs circulait et elle avait apparemment pris la fuite avec une femme des bas quartiers. Syd répondait à toutes ces informations avec un sourire plaqué sur son visage et des hochements de tête répétés. C’était toujours la même chose, la plupart des gens étaient là dans l’unique but de se tirer dans les pattes et Syd n’en avait pas grand chose à faire. Il s’était laissé distraire quelques instants et sans qu’il ne s’en rende compte, Tamsyn avait disparu elle aussi. Elle n’était pourtant pas bien loin, aux côtés de Dick, évidemment.

Il pouvait entendre des bouts de conversation à mesure qu’il avancait, les remarques déplacées auxquelles la jeune femme répondait d’un rire gêné, « … c’est dommage de cacher un tel corps sous tant de vêtements, Mademoiselle Huggins… ». Cet homme était l’incarnation du mal.
Sans y réfléchir à deux fois, il se plaça à côté de Tamsyn et lui dit, sans jeter un regard à Dick « hey, j’ai bien cru que je t’avais perdu Tammy ». Avant même qu’elle ne puisse lui répondre, Dick reprit la parole, « j’étais justement en train de féliciter Mademoiselle Huggins », c’était un menteur en plus d’un homme dégoutant. « Vraiment ? » Répondit-il avec un haussement de sourcil qu’il ne pouvait pas vraiment contrôler. Il se tourna de nouveau vers son associée. « Je crois que Lorenzo voulait nous dire quelque chose, faudrait peut-être qu’on aille voir ». Sydney n’était pas vraiment un menteur, mais le détournement de la vérité semblait être parfaitement approprié en cette occasion. Il fit passer Tamsyn devant afin de lui indiquer le chemin vers lequel ils pouvaient s’enfuir. Dick le rattrapa par la manche avant de lui dire avec un malaise déconcertant « je suis désolé, Sydney, je savais pas que c’était chasse gardée, mais bon, tu comprends qu’on ait envie d’essayer ». Syd ne put retenir le rire nerveux qui lui échappa à ces mots. « je … », il ne savait pas par où commencer, le fait que Dick pensait que Tamsyn et Sydney était ensemble, que c’était ça qui lui faisait finalement arrêter ses avances ou juste le dégout que ses remarques lui inspirait. « Vous êtes une personne dégoutante, et vous devriez sérieusement remettre en question tout ce que vous faites, et tout ce que vous dites. Tamsyn ne m’appartient pas, il n’y a pas de chasse gardée, et je plains sincèrement les femmes qui doivent vous supporter au quotidien. »

Tamsyn avait presque oublié à quel point c’était sympa, de passer vraiment ces soirées avec Syd. À leurs débuts, ils étaient plus collés l’un à l’autre qu’aujourd’hui : c’était plus facile de s’imposer à deux face aux concurrents. C’était plus compliqué pour lesdits concurrents d’essayer de les bouffer, quand ils faisaient front. Mais avec le succès, ils n’ont plus eu besoin de se battre autant, ils n’ont plus eu besoin de s’imposer autant. Alors c’est naturellement qu’ils ont fait passer business avant amusement, et qu’ils se sont habitués à passer ces soirées chacun a un bout de la pièce. Et ça leur a réussi : au cours de ces trois dernières années en particulier, ils ont construit pas mal de relations avec des gens importants, au cours de ces soirées. Mais leur relation à eux s’est un peu étiolée, malgré eux.
Ils dirigent la même entreprise, font régulièrement des réunions de boulot ou des rendez-vous importants avec divers interlocuteurs, mais ce soir, Tamsyn peut pas s’empêcher de remarquer son assurance. C’était souvent elle qui faisait la conversation, au début, parce qu’elle avait le culot de la jeunesse et rien à perdre. Syd était un peu plus discret. Mais maintenant, il anime vraiment les conversations - si bien qu’elle peut se contenter de le regarder être le roi des relations sociales et d’acquiescer à chaque fois qu’il sort l’une de ces jolies phrases dont il a le secret. C’est rassurant.
Elle finit par l’abandonner, au bout d’une petite heure de cocktail, juste pour aller se chercher un verre de champagne. Elle est contente, Tamsyn. Ils ont gagné 8 awards, leurs artistes présents à la soirée ont des étoiles dans les yeux et ne cessent de venir les voir pour leur dire qu’ils ont reçu des compliments et des encouragements. Elle est contente parce qu’elle passe une soirée beaucoup plus fun que ce qu’elle avait prévu.
Et puis, patatra.
Dick l’aborde alors qu’elle attend son verre au bar. Comme si depuis tout à l’heure, il attendait, il guettait le moment où elle allait enfin se débarrasser de son acolyte. Bien sûr, elle prend sur elle, et se rassure en se disant que d’ici deux ou trois minutes, elle parviendra à se débarrasser de lui. Une gorgée de champagne, quelques rires gênés. Mais Dick ne la lâche pas, même quand elle revient vers le centre de la pièce dans l’espoir que quelqu’un vienne lui parler et calmer les ardeurs de l’agent. Il ne suffit que d’une minute avant que le gros nulle dise la phrase de trop, celle qui lui fait voir rouge et lui donne envie de lui foutre un coup de poing dans la gueule. Tamsyn se retourne, excédée. « hey, j’ai bien cru que je t’avais perdu Tammy » La colère quitte les yeux de Tamsyn pour laisser place à une reconnaissance infinie. Elle pourrait lui sauter dans les bras.
L’échange entre les deux hommes est un peu tendu, et la jeune femme se met à soupçonner que Syd ait entendu les paroles peu agréables de Dick, avant de les interrompre. Elle n’aime pas trop ça. « Je crois que Lorenzo voulait nous dire quelque chose, faudrait peut-être qu’on aille voir » Elle acquiesce, ne se faisant pas prier pour partir en avant. Mais quand elle tourne la tête, pensant que son associé la suit, Syd est toujours près de Dick. Merde. Elle les observe un peu de loin, hésite un peu. Ils ont l’air de… discuter. Elle ne sait pas très bien de quoi, mais ça ne lui dit rien qui vaille. Alors elle finit par revenir sur ses pas et par prendre la main de Sydney dans la sienne alors qu’il a toujours les yeux rivés sur Dick. Viens, faut qu’on y aille. Elle le tire un peu plus loin, après avoir adressé un hochement de tête poli à Alvares.
Ils devraient peut-être aller voir Lorenzo, mais au lieu de ça, Tamsyn traîne Syd dans un couloir, un peu plus loin, où les gens ne s’attardent pas trop. Une fois qu’elle s’est assurée que personne d’All Stars n’est autour d’eux, elle plisse les yeux. Qu’est-ce qu’il t’a dit ? Elle a un peu peur de la réponse. Dis-moi qu’il t’a pas dit que je sortais avec lui en secret ou un truc du genre… Il serait bien capable. Elle lève les yeux au ciel et soupire. Fais pas gaffe à ce mec, il est un peu chelou. Tout ce qui sort de sa bouche est… bref. S’il te raconte des trucs, ne crois pas un mot de ce qu’il dit, il aime bien inventer des choses. Elle préfère prévenir : une fois, Dick a raconté à des agents d’une boîte concurrente, Parkers & Co, qu’il avait passé une nuit avec elle sur l’île d’Emorys, au sud d’Altea, et qu’elle lui avait demandé de garder ça secret pour préserver sa réputation. Elle espère que Sydney n’a jamais entendu ça. Il est un peu insistant, mais il est pas méchant. Elle sait même pas pourquoi elle a dit ça. Parce que si, Dick est un vrai connard. Elle a pas à le défendre comme ça. Pourquoi se sent-elle obligée de le faire ? Pour rassurer Syd ? J’suis sérieusement en train de considérer l’idée de me marier juste pour qu’il arrête de tenter sa chance. Elle rit légèrement en disant ça, ce qui rend la chose encore plus triste. Elle devrait pas avoir besoin d’avoir officiellement un homme à ses côtés pour que ce con la laisse tranquille. Il aurait dû comprendre la première fois qu’elle lui a dit qu’elle n’était pas intéressée. Elle a presque honte de parler comme ça, alors elle baisse les yeux sur les bagues qu’elle a aux doigts.

D’un point de vue extérieur, Syd comprend. C’est vrai, Tamsyn et lui sont proches, certes maintenant moins qu’avant, ou du moins pas de la même manière mais ils le sont et l’ont toujours été. Ils vivent aussi dans une société qui a du mal à croire qu’un homme et une femme peuvent être amis sans qu’il n’y ait aucune arrière pensée. Et Sydney est beaucoup de choses, mais il n’est ni stupide, ni aveugle. Il sait comment ce monde fonctionne, a entendu les murmures des gens de nombreuses fois, trop de fois sans doute. Ceux qui se demandent si Syd a réussi grâce à Tammy ou si Tammy a réussi grâce à Syd, généralement sous entendant des arrangements qui seraient qualifiés de pas très catholiques, ceux qui disent tout haut qu’ils ne comprennent pas ce qu’une femme comme elle fait avec quelqu’un comme lui, ou qu’il doit avoir un très grand sens de l’humour -ou autre chose- pour avoir réussi à prendre le coeur de Tamsyn Huggins. Il sait aussi que, objectivement parlant, ces gens n’ont pas tout à fait tord, Tamsyn est belle, a plus de qualités que de défauts, est la fille d’une psychiatre de renom qui a pourtant réussi à se faire son propre nom, toute seule et sans l’aide de personne. Syd est sorti de nulle part, ou plutôt des tréfonds d’altea, a du changer de nom pour que personne ne se rendent compte de son histoire réelle, et a su faire planer le mystère pendant ces quelques années pour une raison simple, les gens ne s’intéressent pas autant à lui qu’à son acolyte. Tamsyn est l’image de la boite, celle qui rayonne sous les projecteurs, tandis que Syd reste souvent tapis dans l’ombre. Alors oui, il comprend que des mecs comme Dick pensent ce genre de chose, mais ça ne l’empêche pas d’être dégoûté de son attitude et de ses mots. Il aurait aimé le trainer dans la boue et lui faire un exposé en plusieurs partie sur pourquoi il n’est qu’une personne détestable mais les mots lui échappent. La répartie peu présente dans ce genre de situation. Et avant que l’autre ne puisse répondre, Tamsyn est de retour, elle glisse sa main dans la sienne et le tire au loin, dans un coin reculé, de quoi attiser les rumeurs un peu plus. Il peut presque entendre Dick pester au loin, s’imagine qu’il est en train de dire à qui veut l’entendre que Syd et Tamsyn sont bel et bien en couple, après tout, il n’a pas vraiment nié ses implications.  
Puis son attention se porte sur Tamsyn, qui le regarde du haut de son mètre soixante (trois) et lui dit de ne pas porter d’attention à ce que Dick peut dire. Ce qu’elle ne sait pas, c’est que Syd sait ce qu’il a dit, peut-être pas tout, mais assez pour vouloir y mettre fin, qu’il laisse enfin Tamsyn tranquille et ruiner sa carrière en même temps si possible. Et malgré lui, les paroles de Tamsyn l’agace, il sait que ce n’est pas elle qui pense vraiment ça, mais que pour une raison ou une autre elle se sent obligée de dire ce genre de chose et de subir tout ça sans rien dire, parce que c’est comme ça le monde du business, que parfois il faut plaquer un sourire sur les lèvres et faire comme si tout allait bien. Mais c’est injuste, trop injuste. Syd l’a déjà vu avec sa propre mère et tout ce qu’elle a subit à cause d’hommes comme Dick Alvares, à cause d’hommes comme son géniteur et même si la situation n’est pas aussi dramatique pour Tammy, le schéma est identique.
« Il est méchant Tammy, c’est un cafard ce type, y a rien qui peut le sauver » sans le vouloir, sa voix est beaucoup plus sèche qu’il ne l’avait prévu. Et il prend une grande respiration avant de poursuivre. « Tu veux vraiment savoir ce qu’il m’a dit ? » Il n’était pas sur de vouloir réellement lui raconter. « Il m’a pas dit que vous étiez ensemble, il croit qu’on est ensemble, et c’est la seule chose qui a l’air de le faire arrêter », quelle enflure, « Et… j’ai pas vraiment nier? enfin, il a pas à savoir ce qu’il se passe entre nous… » il ne se passe rien entre nous, « … enfin dans ta vie, dans nos vies, mais il m’a dit qu’il savait pas que t’étais « chasse gardée » et je lui ai juste répondu que tu ne m’appartenais pas, ni à moi, ni à personne donc … euh, j’imagine qu’il pense qu’on est ensemble ? » Et Sydney ne peut s’empêcher de penser que ce serait peut être une bonne chose, qu’ils soient ensemble ou en tout cas que les gens le pensent. Dick arrêterait sans doute ses avances et il y aurait peut être d’autres gros lourds dans son genre qui arrêteraient également. Mais c’est triste de devoir en arriver là. Triste de vivre dans un monde dans lequel ce genre de choses sont banalisées, et dans lequel le seul moyen pour un homme de ne pas penser avoir quelconques droits sur une femme soit le fait qu’elle appartienne à un autre homme. « Je suis vraiment désolé, qu’il soit comme ça avec toi. Peut-être que s’il croit qu’on est ensemble t’auras pas besoin d’aller jusqu’à te marier du coup » il lâche avec un petit rire nerveux. C’est vraiment, vraiment pas drôle. « Enfin ce que je veux dire c’est que si tu veux le laisser croire ce qu’il croit déjà, ça me dérange pas. » Et puis c’est pas comme si ça changeait réellement quoi que ce soit, Dick pense déjà tout savoir, les rumeurs sur eux circulent depuis assez longtemps maintenant, ça ne serait qu’une extension de la vérité. Et si Syd est honnête avec lui même, ça ne serait pas une épreuve difficile de faire semblant d’être vraiment avec Tammy.

Elle est habituée à savoir se défendre. Après tout, elle le fait depuis qu’elle est adolescente. Elle a sans cesse dû défendre ses rêves, son ambition, ses choix. Elle s’est retrouvée à pitcher ses idées devant des groupes entiers de personnes sceptiques. Elle n’a jamais eu de problème avec ça. Tamsyn a toujours eu de l’assurance, et surtout, elle a toujours cru en elle et en ce qu’elle voulait. Alors forcément qu’elle a honte, quand elle n’arrive pas à se défendre correctement face à un débile comme Dick Alvares. Ça ne devrait pas être compliqué pourtant, de le tâcler, et de le faire fuir. Elle a honte d’en parler à Sydney, parce qu’il sait qui elle est, et qu’il sait très bien que si elle n’a pas réussi à se débarrasser de ce gars, c’est qu’il y a vraiment un problème.

« Il est méchant Tammy, c’est un cafard ce type, y a rien qui peut le sauver » Elle est presque surprise de cette réaction un peu brusque de Sydney. C’est pas souvent, qu’il réagit comme ça. « Tu veux vraiment savoir ce qu’il m’a dit ? » Du coup, elle a presque peur, vu la façon dont il réagit. « Il m’a pas dit que vous étiez ensemble, il croit qu’on est ensemble, et c’est la seule chose qui a l’air de le faire arrêter » Tamsyn hausse les sourcils, et ses lèvres esquissent un petit Oh. Oui, clairement, elle ne s’attendait pas à ça. Tout sauf ça. Jusqu’à maintenant, Dick a toujours pris pour acquis qu’elle était célibataire. Pourquoi, soudainement, penserait-il qu’elle est en couple avec Sydney ? Bon, après, il ne serait pas le premier. On leur a souvent posé la question, depuis qu’ils ont monté High Hope Entertainment. « Et… j’ai pas vraiment nié? enfin, il a pas à savoir ce qu’il se passe entre nous… » Elle se sent presque soulagée - même si elle devrait pas. Disons que ça la dérange pas, que Dick pense ça. Est-ce que c’est une mauvaise chose, que ça la dérange pas ? Probablement. « … enfin dans ta vie, dans nos vies, mais il m’a dit qu’il savait pas que t’étais « chasse gardée » et je lui ai juste répondu que tu ne m’appartenais pas, ni à moi, ni à personne donc … euh, j’imagine qu’il pense qu’on est ensemble ? » Tamsyn évite son regard et balaie le couloir des yeux. D’accord. Hmm. Ça pourrait… Ça pourrait être pire ? dit-elle d’une petite voix. « Je suis vraiment désolé, qu’il soit comme ça avec toi. Peut-être que s’il croit qu’on est ensemble t’auras pas besoin d’aller jusqu’à te marier du coup »[/b] Elle rit légèrement, puis soupire. Oui, techniquement… Oui. C’est pas faux. Mais est-ce que c’est une bonne idée, de le laisser croire ça ? Techniquement, elle est carrément partante. C’est juste que… est-ce qu’elle se sent suffisamment à l’aise avec Sydney pour… faire semblant de se comporter comme…. sa… petite amie ? Ils se connaissent très bien, et elle sait que s’il y a bien une personne pour faire ça avec elle, il vaut mieux que ce soit lui. Mais en même temps… Ça la met un peu mal à l’aise, de le mettre dans cette position. De faire ça avec lui. Ils ont passé une grande partie de leur vie depuis la fondation de leur entreprise à se montrer un exemple de l’amitié homme-femme… Alors s’ils prétendaient être ensemble.. En plus de foutre un coup à son esprit féministe, elle foutrait un coup à ce truc qu’ils défendent depuis le début. « Enfin ce que je veux dire c’est que si tu veux le laisser croire ce qu’il croit déjà, ça me dérange pas. » Tamsyn pince les lèvres, tergiverse un peu. Franchement, l’offre est alléchante.

Le destin ne lui laisse pas vraiment le temps de réfléchir.
Dick débarque dans le couloir - Tamsyn le soupçonne de les avoir suivis. Brusquement, elle prend la main de Sydney dans la sienne, entremêle leurs doigts et se rapproche de son visage. Tout bas, elle dit ok on le fait. sans vraiment penser aux conséquences. Pour combien de temps vont-ils tenir cette mascarade ? Est-ce qu’ils font seulement ça face à Dick, ou prétendent également être en couple devant les autres pour être plus crédibles ? Est-ce que… ils répondent oui aux tabloïds qui leur demanderont si les rumeurs sont vraies ? Est-ce que… ils vont devoir se montrer ensemble en public, plus que maintenant ? Est-ce que…
Est-ce qu’elle va devoir l’embrasser ?
Shit, shit, shit. Elle perd le contrôle de ses pensées et fait brusquement un pas en arrière parce que l’idée que tout ça puisse aller aussi loin lui fait peur. Et en même temps.. « oups, je voulais pas vous interrompre, les enfants… » Dick lève ses mains devant sa poitrine, et Tamsyn serre les dents. Quoi, maintenant qu’il la croit en couple avec Sydney, ils sont de nouveau des enfants ? Il la dégoûte. « Fini les conciliabules, la fête est de l’autre côté... » Tamsyn soupire et embarque Sydney de nouveau dans la pièce principale du cocktail. Elle ne lâche pas sa main. Ils vont vers le bar, demande deux verres de champagne. Elle a besoin de boire. Il ne suffit que de quelques secondes pour que les visages se tournent peu à peu vers eux. Bien sûr, Dick n’a pas pu garder sa bouche fermée. Bon, visiblement, le destin a choisi pour eux : ils vont être obligés de prétendre devant tout le monde. Tamsyn lâche la main de Syd, s’accroche à son bras, et se met sur la pointe des pieds pour lui dire un truc à l’oreille. Bon euh. Je veux pas te faire peur. Mais j’crois qu’il l’a dit à tout le monde. Elle regarde derrière eux et finit par regarder Sydney. Qu’est-ce qu’on fait ? Quel est le plan ? Bordel je sais pas faire ça moi. Elle panique. Et elle panique pas souvent, Tamsyn. Le truc, c’est qu’elle a jamais été vraiment en couple. Vite fait, quand elle était jeune, mais jamais rien de sérieux. Au secours. Elle sait même pas comment elle est censée se comporter. C’est toi l’expert, dans ces trucs-là, aide moi. aide moi. Elle pose son coude sur le bar et plonge son visage dans sa main. Bordel, dans quoi on s’est embarqués?