Katan + Back Against the Wall

« C’est ça, bonne nuit. » Kate ne répondit que par un soupir dédaigneux et se retourna sur le côté pour fixer le mur, espérant qu’elle trouverait plus rapidement le sommeil dans cette position. « Akich rbi izarne, » Elle tourna brièvement la tête dans la direction d’Ifan quand elle l’entendit grommeler mais ne daigna même pas répliquer et se rallongea.

La pilote ferma les yeux et se laissa bercer par le bruit de la pluie, étant habituée à ce son depuis un long moment avant de s’endormir rapidement.

Elle était où là ?

Kate ferma les yeux et se pinça l’arête du nez en inspirant longuement.
C’était quoi ce délire ?
Il y avait encore un instant, elle était sur son lit à essayer de dormir et maintenant elle se réveillait elle ne savait où. Elle libéra son visage et observa un moment les alentours, cherchant un lieu, un détail particulier qui attirerait son attention, lui remémorerait quelque chose.
Elle connaissait cet endroit. Elle ne savait pas vraiment comment ni pourquoi mais cet endroit avait quelque chose de familier.

Elle se décida finalement à se mettre en route et commença à marcher lentement, continuant d’observer les alentours. Elle était déjà venue ici. Elle en était certaine. Mais tout lui semblait tellement lointain, presque comme un rêve.
Elle s’immobilisa brusquement.
Un rêve…
Evidemment, ça ne pouvait être que ça.
Alors quoi ? Le destin -ou peu importe de quelle force cosmique il s’agissait- avait décidé d’en remettre une couche ? C’était ça ?
Se prendre la tête aussi violemment avec Ifan n’avait pas suffit ? Il fallait qu’ils remettent ça dans leur sommeil en plus ?

La pilote secoua la tête, essayant de faire partir ces idées noires et continua sa marche jusqu’à arriver non loin d’un ruisseau. Ruisseau au bord duquel était assis Ifan, qui lui tournait le dos.
Elle resta un moment à distance à le regarder silencieusement mais se rapprocha finalement, en gardant ses distances.

« Kate… » Les bras croisés, dans une posture presque défensive, elle souffla un. « Ifan. » D’une petite voix.
Elle ne ressentait plus du tout les effets de l’alcool, de la fatigue ou de la fièvre dû à sa blessure. Ce qui faisait qu’elle était plus réfléchie que lors de leur conversation d’un peu plus tôt. Elle ne démarrerait pas au quart de tour cette fois. Parce qu’elle se rendait bien compte qu’elle avait été odieuse avec lui, que lui raconter ce qu’elle avait vécu à cause de sa soulmark avait fait remonter une rancœur vieille de plusieurs années. Elle s’était défoulée sur Ifan, gratuitement, en le blâmant pour ce qu’elle avait subie alors qu’il n’y était pour rien.

« Laisse-moi tranquille. » Kate baissa les yeux, préférant fixer le sol. Evidemment qu’il ne voulait plus lui parler. Pas après tout ce qu’elle lui avait balancé. « Si tu veux m’engueuler ou me frapper t’attendras qu’on sorte de là, que je me réveille. Je veux… » Elle hocha négativement la tête, lentement mais garda le silence. « …je veux juste… » Elle se sentait probablement aussi mal que lui. A cause de la soirée qu’ils venaient de passer mais aussi -elle devait bien l’admettre- parce que le lien qu’ils avaient semblait bien plus fort ici. Elle était presque capable de ressentir ce que sa soulmate ressentait. « …je veux pas que tu me voies comme ça. » Elle releva la tête vers Ifan et déglutit avec difficulté avant de se rapprocher lentement de lui pour s’asseoir elle aussi au bord du ruisseau mais à une certaine distance du brun pour ne pas le brusquer.

Elle ramena ses jambes contre son torse et les enserra avec ses bras, appuyant son menton sur ses genoux. Elle resta un long moment silencieuse à fixer le ruisseau à ses pieds avant de briser enfin le silence, tournant son regard vers Ifan. « Que je te vois comment ? En train de pleurer ? » Un très discret sourire attendrit apparu sur son visage. « J’ai été odieuse avec toi. Je t’ai insulté pendant toute la soirée alors que tu voulais juste m’aider. Tu devrais plutôt dire que tu veux juste ne plus me voir. Pas avoir honte parce que je t’ai poussé à bout. » Elle reposa son regard face à elle, fixant un point invisible à l’horizon. « J’aime bien cet endroit. Il est… Reposant. » Elle expira bruyamment. « Ça m’avait manqué de venir ici. » Elle ne l’avait jamais reconnu à l’époque, surtout parce qu’elle était trop fière mais elle avait toujours aimé découvrir le monde d’Ifan. C’était les seuls moments où elle pouvait sortir du Lobster et de ses murs, respirer de l’air pur, voir des plantes, toutes ces choses qu’elle n’avait pu qu’imaginer quand elle était plus jeune.
Et revoir tout ça maintenant, le redécouvrir presque, avait un effet apaisant sur elle. Ça lui faisait vraiment du bien.

La pilote cessa de fixer l’horizon et reporta son attention sur Ifan. « Je… Je suis désolée. Pour tout. J’ai été horrible avec toi. Gratuitement. Et je parle pas seulement de ce soir. » Elle resserra un peu plus la prise autour de ses jambes avant de continuer. « C’est juste que… » Elle soupira bruyamment et se massa longuement les paupières. Elle n’avait vraiment pas l’habitude de parler autant, de se sentir aussi vulnérable. « Je te l’ai dit. J’ai déjà beaucoup trop souffert à cause de ça. » Elle désigna rapidement sa soulmark du regard. « Et je peux pas… Je veux pas prendre le risque de le ressentir à nouveau. » Elle sentit ses yeux commencer à s’embuer et détourna le regard de sa soulmate. « Ça a failli me détruire, tu le sais. Je sais que tu l’as ressenti toi aussi. » Elle essuya ses yeux d’un revers de main en grommelant une insulte. Elle détestait lâcher la pression comme ça et s’afficher de la sorte. « Je suis désolée Ifan. Parce que tu es persuadé que je me plante et que tu as peut être raison mais… » Elle secoua doucement la tête. « Je peux pas. »

« Que je te vois comment ? En train de pleurer ? » et il soupire en ronchonnant, (il a honte), chasse son regard loin de sa soulmate qui est maintenant assise à ses côtés; c’est nerveux et il renifle, ses yeux lui font mal et le reste aussi, ça le transperce de toute part. Les émotions sont bien trop fortes ici, d’autant qu’avec elle, il y a aussi les siennes qui s’additionnent sur le tas. Les siennes avec lesquelles il valse malgré lui, ni plus ni moins. Comme s’il n’y avait aucune frontière. Sauf celles qu’ils voulaient bien se poser eux, alors que les âmes, elles, étaient vraisemblablement à leur place. Presque trop unies pour s’éloigner encore une fois. « J’ai été odieuse avec toi. Je t’ai insulté pendant toute la soirée alors que tu voulais juste m’aider. Tu devrais plutôt dire que tu veux juste ne plus me voir. Pas avoir honte parce que je t’ai poussé à bout. » et il fronce les sourcils Ifan, il se sent plus que concerné, mais cette éventualité qu’elle énonce ne correspond absolument pas à ses attentes… alors quoi? Se mordre les doigts? Continuer à pleurer pendant qu’elle essaie de recoller les morceaux? Pendant combien de temps encore allaient-ils devoir jouer au chat et à la souris, à vouloir rattraper l’autre qui se détourne, et inversement? Quand en auront-ils assez de mentir? De se mentir?

Alors il secoue un peu la tête, c’est étrange parce qu’il a l’impression que le vent tiède s’est un peu levé, ce même courant d’air qui a fait soulever quelques mèches de ses cheveux ondulés. Je t’en veux pas. Il pourrait jamais lui en vouloir, il pourrait jamais la détester; même s’il s’y essayait. Et c’est bien ça le problème. Tout serait plus simple dans cette histoire, s’il avait été capable de l’éjecter de sa vie… parce qu’au moins, il aurait fait ce qu’elle avait vraiment voulu, et il ne serait jamais venu à sa rencontre, il n’aurait jamais foutu du gros sel sur cette foutue plaie…
C’est qu’il reste silencieux, de toute façon il étouffe ses larmes, il n’a pas envie non plus qu’elle entende sa voix se briser dans un sanglot. Pourtant, il y en a bien un qui monte lorsqu’elle lui glisse ces mots-là, qui le surprennent et le comblent à la fois… « J’aime bien cet endroit. Il est… Reposant. Ça m’avait manqué de venir ici. » Il cache son visage d’une de ses mains, serre les dents, tête baissée. Toi aussi tu m’avais manqué. C’est toujours chez toi ici. Ifan tente de reprendre les rênes, alors il inspire et redresse épaules et colonne vertébrale, il a les joues barbouillées de larmes et a mal à la gorge à force d’essayer de tout ravaler. Sa tête fait oui et il la fuit toujours des yeux, se mord le frein sans sentir aucune douleur. Tout ce qui lui fait mal, c’est les émotions, toujours, qui l’écrasent.

Ifan regarde un peu mieux leur environnement, il est là et aussi beau parce qu’il s’en souvient parfaitement, parce qu’il le chérit. Ses yeux bicolores rechutent sur ses jambes et pieds, sur l’eau et le, les reflets. Comme un certain calme qui semble revenir, puis…

« Je suis désolée Ifan. Parce que tu es persuadé que je me plante et que tu as peut être raison mais… »
« Arrête de t’excuser… je t’en veux pas… alors arrête… » murmure t-il.
« Je peux pas. »
« Je sais. »

Pas agressif, seulement résigné. Il a réussit à reprendre un peu ses esprits pendant qu’elle lui avait légué ces aveux, pour le moins inédits, et plus que de le toucher, il est bouleversé. C’est sans doute pour ça qu’il s’est ancré à nouveau dans cette fresque chimérique, qu’il a finalement levé les yeux pour aller chercher ses traits… et pendant quelques secondes, il la regarde sans savoir que dire. Jusqu’à laisser parler son cœur, comme il savait si bien le faire.

« Tu sais…, il paraît un peu plus éteint et l’environnement semble se figer dans une grisaille que seuls eux pouvaient vraiment percevoir, Khiwaj est mort et Siam… il laisse de l’air chimérique s’échapper de ses lèvres entrouvertes et tremblantes. Siam ne peut plus marcher. » il ne sait pas pourquoi il lui confie ça, peut-être parce qu’elle fait aussi partie de la famille, qu’elle a toujours été quelqu’un d’important et qu’elle connait ces prénoms comme s’il s’agissait des siens, même si elle en sait plus grand chose aujourd’hui. Ils devaient avoir l’air de fantôme aujourd’hui, et le plus difficile à accepter était bien l’idée que ce soit aussi le cas pour l’altéan. « Et c’est moi le responsable. »

C’est que ses larmes veulent à nouveau couler. Il les dompte tant bien que mal en poursuivant, en tentant de garder l’œil accroché à son visage, la seule chose qui importe. Un torrent de couleurs dansent autour de sa silhouette, tranchant avec ce qui l’entoure, pourtant déjà fort lumineux. « Je veux pas faire souffrir quelqu’un d’autre… je veux pas détruire qui que ce soit. » Parce qu’il ne l’a jamais voulu. Ifan n’est pas un homme de vice ou un monstre. Seulement un homme qui essaie. « Je veux plus que tu souffres. » Et moi non plus, comme une évidence, qui n’est pourtant pas prononcée. « Alors fait ce que tu veux, Kate… » ses yeux gonflés se détournent un peu et viennent se fixer sur le tapis aqueux. « …tant que ça te fait du bien. »

Il laisse quelques longues secondes filer. Toujours aucun poisson.
« Moi… j’ai pas envie de partir. Pas après tout ce que j'ai fait… tout ce que j'ai sacrifié… Pourquoi mentirait-il? Le pouvait-il seulement ici? Le regard qui revient vers elle, qu’il soutient, parce que ses propos sont d’une importance capitale. Mais si c’est vraiment ce dont tu as besoin, le camp mis à part… »

La voix se brise malgré lui et délivre une autre larme récalcitrante sur sa joue.

« Je le ferai, t’entends? »

« Je sais. » Kate tourna à nouveau la tête vers Ifan et elle soutint son regard pendant un moment, lui lançant un sourire attristé avant de hocher faiblement la tête, le remerciant silencieusement. Elle reposa son menton sur ses bras, toujours enserrés autour de ses jambes et recommença à fixer l’horizon.
Elle ne comprenait pas vraiment ce qu’il ressentait. Ils étaient pourtant beaucoup plus liés dans ce rêve mais elle ne parvenait à décrypter les émotions de sa soulmate. Il semblait vraiment accepter ce qu’elle venait de lui dire et ne semblait pas lui en vouloir mais d’un autre côté, elle avait l’impression qu’il était simplement résigné. Comme s’il avait compris pourquoi elle ne pouvait pas leur donner une chance mais qu’il ne parvenait pas à l’accepter.
Elle ne savait vraiment pas quoi faire.

« Tu sais… Sans bouger la tête, la pilote tourna son regard vers le brun. Khiwaj est mort et Siam… Elle déglutit avec difficulté, attendant qu’il continue. Siam ne peut plus marcher. » Elle ne put s’empêcher de lâcher un. « Putain. » Dans un souffle et baissa les yeux, ne sachant vraiment plus où se mettre.
Elle n’avait pas été là quand c’était arrivé. Elle avait ressenti la souffrance d’Ifan, elle s’en souvenait très bien. Elle avait presque deviné ce qu’il s’était passé quand c’était arrivé, rien que par ce qu’elle avait pu ressentir. Mais elle n’avait pas été là.
« Et c’est moi le responsable. » Ses yeux s’écarquillèrent et elle tourna vivement la tête vers Ifan. Qu’est ce qu’il venait de dire ? Comment est ce qu’il pouvait être responsable ?
Putain elle s’en voulait de plus en plus de ne pas avoir été présente.

« Je veux pas faire souffrir quelqu’un d’autre… je veux pas détruire qui que ce soit. » Il fallait qu’il arrête. Il n’y était pour rien. Ce n’était pas de sa faute à lui s’ils avaient été lié et si elle n’avait pas voulu de ce lien. « Je veux plus que tu souffres. » Il semblait pourtant tellement plus en souffrance qu’elle. « Alors fait ce que tu veux, Kate… Tant que ça te fait du bien. » Pourquoi est ce qu’il continuait à la faire passer avant lui ? Est ce qu’il était incapable de penser un peu à lui ?

« Moi… j’ai pas envie de partir. Pas après tout ce que j'ai fait… tout ce que j'ai sacrifié… Oh non… Il n’allait pas lui dire ce qu’elle était en train d s’imaginer.
La pilote serra la mâchoire et soutint son regard. Mais si c’est vraiment ce dont tu as besoin, le camp mis à part… » Non. « Je le ferai, t’entends? » Elle ne comprenait pas. Enfin si, elle comprenait qu’elle avait été tellement froide pendant toutes ces années et depuis son arrivée sur Terre. Et elle comprenait que c’était à cause des explications qu’elle lui avait donné qu’il disait ça et qu’il pensait que c’était sans doute la meilleure solution.

Kate libéra ses jambes et se prit son visage dans ses mains en inspirant lentement. Elle se masse ensuite longuement les paupières, essayant de faire disparaître les larmes qui embuaient ses yeux depuis le début de cette conversation. « Je comprends pas. » Elle laissa passer un moment de silence. « Je ne comprends pas comment tu peux penser ça. » Elle tourna son visage vers sa soulmate. « T’as tout sacrifier pour venir ici. Ifan… » Elle déglutit avec difficulté. « T’as abandonné ton monde, ta famille, ta propre sœur pour me rejoindre. J’avais coupé les ponts, je voulais plus te voir mais t’es quand même venu me retrouver. » Elle repassa une main sur son visage en soupirant. Elle était vraiment au bout. « Et maintenant tu me dis que t’es prêt à partir ? Je… Pourquoi ? » C’était à cause de ce qu’elle lui avait dit. Elle le savait. Mais elle ne parvenait pas à se faire à cette idée.

Elle détourna le regard. « Je veux pas que tu partes. » Toute cette soirée. Toute cette conversation qu’ils avaient eu. Tout ça n’avait aucun sens. « Tu dois te dire que je suis un monstre de te dire ça alors que je t’ai dit que je ne pouvais pas continuer comme ça mais j… » Elle essuya une nouvelle fois ses larmes d’un revers de main et se retourna vers Ifan, ancrant son regard dans le sien. « J’ai besoin de toi. » Elle sentit son cœur exploser dans sa poitrine au moment où elle prononça ces mots et prit une grande inspiration, hachée, douloureuse. « Je sais pas… Je comprends pas pourquoi. Mais j’ai besoin que tu restes. Parce que si tu pars j… » Un sanglot incontrôlé lui échappa et elle lâcha un. « Merde ! » Tout en se détournant le temps d’essayer d’essuyer ses larmes. Pourquoi est ce qu’elle était comme ça ? C’était lié à ce rêve et son lien avec Ifan, oui, mais pourquoi est ce qu’elle craquait comme ça maintenant ? Parce qu’elle réalisait ce que ça impliquerait si sa soulmate disparaissait de sa vie ?

Elle garda le silence pendant un long moment, essayant de se calmer.

« J’ai envie de te cogner rien que parce que tu évoques l’idée de t’en aller. » De t’embrasser aussi. Elle retint une nouvelle insulte et secoua la tête. Ifan avait ressenti ça, elle le savait.
Elle détestait perdre le contrôle et craquer comme ça.
Elle souffla un. « Putain mais qu’est ce qu’il m’arrive ? » Plus pour elle-même qu’Ifan et hocha faiblement la tête, essayant de se rassurer.

« Je veux que tu restes. » . Son regard s’ancra à nouveau dans celui de sa soulmate alors qu’elle reprenait. « Tu le sais, je peux rien te promettre. Je veux pas, je peux pas te dire que ça va tout changer et qu… » Elle haussa les épaules. « Je veux rien te promettre. » Parce qu’elle était incapable de savoir comment ça allait se passer. Elle ne voulait pas lui faire miroiter un espoir alors qu’elle n’était pas certaine que les choses changeraient. « Mais… » Elle tendit sa main vers Ifan pour attraper l’une des siennes. « Reste. » Elle la serra doucement dans la sienne. « S’il te plaît. »

Il pourrait lui expliquer, lui dérouler en long, large et en travers, en quoi il avait été responsable du malheur de Siam ou de la fin tragique de son aîné. Il pourrait, mais Ifan ne parvient pas à le faire, pas encore, lui qui pourtant a toujours eu des facilités à parler, à partager avec son prochain. C’est qu’aujourd’hui il y a une ombre qui pèse, mais l’humain n’est pas mort, il a encore quelque chose de bon en lui, plus qu’il ne le croit, et ça peu importe ce que veut bien lui faire croire les divins par des coups du sort.
Est-ce que sa soulmate voyait? Ils avaient tant changé depuis ces jeunes jours où ils cherchaient leurs songes pour pouvoir s’y retrouver. Alors qu’ils se prenaient encore la main et riaient ensemble malgré ce qui les éloignait, à refaire le monde de l’autre qu’ils  ne découvraient que par ces tableaux chimériques façonnés par leur esprit d’enfant.
Maintenant il y a la distance, celle qui fracture et laisse le cœur en pleine hémorragie. Des années que cela dure, que ça saigne…
Et qu’aujourd’hui pour laisser échapper ces émotions qui tuaient à petit feu.

Kate ne comprend pas pourquoi il est capable de renoncer à tant de choses, à piétiner tous ses efforts pour son simple confort. Elle ne comprend pas parce qu’elle n’a pas idée du sentiment qui l’anime, ni de son intensité — ou peut-être que si? Ce même sentiment qui lui comprime le cœur lorsqu’il l’aperçoit, ce même sentiment qui l’a poussé à quitter les siens et à trouver un sens à sa vie, à pousser des montagnes et progresser dans l’enfer d’une Terre abîmée…

« C’est Siam qui m’a poussé à venir te chercher. Chose qui surprendrait certainement la concernée, elle qui ne l’avait jamais connu autrement que par des descriptions ou images mentales de la part de son grand-frère. « Moi je voulais pas… enfin si… mais je voulais pas te forcer. À rien. Et c’est toujours le cas. »

Alors lorsqu’elle lui demande pourquoi, il a comme envie de poursuivre ce qu’il lui disait lorsqu’ils étaient éveillé, mais Ifan n’a pas le courage de pousser aussi loin la confession. Parce que ça l’effraierait davantage et l’attirerait encore plus loin de lui, il le sait. Ce doit être aussi ça qui l’a poussé à l’éviter, à refouler. Parce qu’elle a peur, tout simplement. Et qu’il n’y a rien de pire que de s’en apercevoir après une longue période à se persuader du contraire.

Il avait comprit que sa présence était à double-tranchant, et c’était pour ça que l’altéan avait conclut qu’un éventuel départ pourrait la soulager… après une énième déchirure, inévitable. Force est de constater qu’aucun des deux n’était prêt à retenter l’expérience… mais pour ça, il faudrait qu’elle le lui dise. Clairement.

« Je te l’ai dit… je veux plus que tu souffres. » murmure t-il, même s’il a l’impression que sa soulmate le savait déjà. Pour ce qui se cachait réellement derrière… c’était une autre histoire. L’homme ne la quitte pas des yeux, s’essuie d’un revers de la main l’une des larmes qui lui chatouille la joue par son inertie. « Je sais qu’on va revivre ce… malaise. Le mot n’est pas assez fort, mais modeste qu’il est, il ne saurait le décrire autrement pour l’instant. Mais ça s’est estompé pour toi, avec le temps… non? Alors… » « Je veux pas que tu partes. » ses mots font l’effet d’une déflagration en plein visage, et le plonge dans une aphasie temporaire. Stupéfiant, puisqu’il ne s’était pas attendu à ça. Tous les gestes, tous les mots, depuis le début, n’ont eu de cesse que de l’informer du contraire. Qu’il n’avait pas sa place à ses côtés, ou au moins avec une distance de sécurité plus que respectable. Jusqu’à ce soir-là, il n’avait pas eu le droit à un sourire. Et… elle non plus.

Il la voit qui flanche à son tour sous le poids de ses émotions, son monde se retrouve alors à côtoyer le sien, ça le préoccupe et ne cherche pas le contact, bien qu’il en ait cruellement besoin — et envie.
Quand un sanglot lui échappe, Ifan se meut mais stoppe son geste dans son élan, laissant finalement sa main reposer sur le tapis de verdure et ses mâchoires se comprimer sous la frustration. C’est bien ça qu’il ne voulait pas, la voir pleurer. La nécessité d’en arriver là serait limpide une fois tirés de là. Sans doute. Il y a une tonne de mots qui lui brûlent les lèvres sans les franchir, l’homme laisse son regard glisser jusqu’à l’eau, aperçoit un premier emmiki… un premier poisson d’argent qui file, et un emmiki solitaire a toujours été signe de bonne augure. « J’ai envie de te cogner rien que parce que tu évoques l’idée de t’en aller. »  et il grimace un peu à cette remarque, avant de sentir cet autre chose qui défroisse ses traits presque aussitôt, le laissant flotter sur un nuage invisible. L’incompréhension le gagne aussi, très vite remplacé par le besoin de s’approcher de sa soulmate, la seule qui importe.

Il acquiesce doucement à ses propos, qu’il digère difficilement mais sûrement — ils traîneront dans sa tête pendant des jours et des jours, c’est certain. Ses deux mains se sont fermées sous la nervosité, l’une sur sa cuisse et l’autre sur l’herbe; quand soudain, c’est une douce chaleur qui l’enveloppe alors qu’il sent la main de Kate sur la sienne. Les yeux de l’altéan vinrent se planter dans les siens, alors qu’il secouait presque imperceptiblement la tête. « Reste. S’il te plaît. » Un mouvement de tête qui fut un peu plus marqué la seconde qui suivit. Son poignet pivote un peu pour chercher un paume contre paume, saisissant simplement sa main à son tour pour y répondre. Il regarde alors sa soulmark qui a une apparence étrange, il ne l’avait jamais vue ainsi — peut-être parce qu’ils étaient dans un rêve, et que dans les rêves, tout pouvait se déformer très vite. Intrigué, il avait retourné un peu sa main et bras, entraînant celle de Kate par la même occasion.

Malgré ce détail il ne dit rien, et après un silence presque religieux qu’il impose malgré lui, (il se confronte à l’envie de s’approcher et de maintenir la distance), l’homme se décale de quelques centimètres pour aller s’assoir un peu plus près. Ici les interdits sont brisés, il s’approche d’elle et va chercher son front après avoir glissé une main près de ses tempes pour la préparer au geste. Simple et chaste baiser sur son front avant de s’éloigner — la seconde fut courte mais révélatrice.
« D’accord. » qu’il énonce en fixant ses yeux noisette, un sourire léger zébrant ses traits ensoleillés.
Malheureusement, il y a un bruit, une sensation qui le dérange, c’est à peine progressif, presque trop soudain. Ifan se sent projeté ailleurs, au loin, dans un puits sans fond…
La réalité à ses portes.

Dieu qu’il a mal au crâne en ouvrant ses yeux, Loa ronflant sur sa poitrine. Il y a trois coups porté sur ce qui les sépare de l’espace commun du camp. Ifan passe une main sur son visage, lasse et ponctuée d’un soupir long, qui réveille le furet. « Anders, on a paumé le toubib pendant la pluie de cette nuit, j’crois! Y’a Jasper qu’a besoin de soins, il a pas pu se protéger à temps ce con, il a douillé toute la nuit et… » Rocket… bah voyons? Encore un qui portait bien son nom, il était à moitié suicidaire (et à moitié simplet) mais au moins il était rapide à l’ouvrage, quoi qu’il fasse. Mais actuellement allait surtout prendre très cher, que ce soit de la part d’Anders ou Al-Khadiri. Ce n’était plus qu’une question de secondes.

Encore une journée qui commençait bien…

Depuis combien de temps est ce qu’elle ne lui avait plus, simplement tenu la main ? Ça devait remonter à son enfance, quand ils se retrouvaient tous les soirs et qu’ils n’attendaient que ça pendant toute la journée.
Elle ne s’en était pas rendu compte, mais ce contact, tout comme l’endroit où ils se trouvaient, tout ça lui avait affreusement manqué. Elle le réalisait maintenant qu’elle avait sa main dans celle d’Ifan.

Kate ne disait plus rien. Elle se contentait de regarder sa soulmate, les larmes aux yeux et un sourire presque imperceptible aux lèvres.
Elle ne savait pas si elle était heureuse ou triste. Ses émotions étaient tellement mélangées, tellement confuses qu’elle était incapable de décrire ce qu’elle ressentait.
Elle était heureuse, plus qu’elle ne l’avait jamais été depuis des années, de retrouver Ifan. De retrouver ce lien. Mais dans le même temps elle se sentait terriblement mal. Parce qu’elle avait avoué tout ça à sa soulmate mais qu’elle ne pouvait pas se laisser aller complètement.

Ifan fit pivoter son poignet, bougeant sa main dans le même mouvement, ce qui provoqua un frisson chez la pilote, rapidement remplacé par une sensation de douce chaleur dans sa poitrine. Elle s’essuya encore ses larmes d’un revers de sa main libre et posa son regard sur leurs mains entrelacées, son sourire s’étirant un peu plus.  
Ce contact lui faisait vraiment du bien.

Sa soulmate se rapprocha doucement d’elle, s’asseyant un peu plus près et il avança lentement une main jusqu’à son visage. Il la glissa près de ses tempes, tirant un nouveau frisson à la jeune femme et elle resta immobile avant de fermer ses yeux en le voyant rapprocher son visage. Il vint presser ses lèvres sur son front, faisant cogner son cœur encore plus fort dans sa poitrine et elle rouvrit les yeux quand il se recula, souriant en le voyant lui aussi sourire. « D’accord. »

Kate détestait les contacts. Elle ne supportait pas qu’on la touche sans qu’elle le veuille. Mais sentir la main d’Ifan sur sa joue, ses lèvres sur son front, lui donnait envie d’en avoir encore plus. Elle ne voulait pas qu’il s’éloigne.
Elle saisit la main de sa soulmate toujours posée sur sa joue et la serra doucement dans la sienne, la caressant du pouce et souffla un petit. « Merci. » Qu’elle ponctua par un sourire un peu plus grand.

Un bruit sourd résonna dans sa tête, la faisant grimacer, et elle réalisa rapidement que tout s’effaçait sous ses yeux, la ramenant trop rapidement à la réalité.

Kate ouvrit brusquement ses yeux en se réveillant et prit une grande inspiration, comme si elle avait été en apnée trop longtemps. Elle cligna plusieurs fois des yeux, essayant de comprendre ce qu’il se passait et où elle était. Elle réalisa rapidement qu’elle était réveillée, allongée sur son lit quand une nouvelle série de coups contre sa porte résonna dans ses quartiers.

Elle se releva d’un bond, ignorant la sensation de vertige qui la saisit et se dirigea rapidement vers la porte. « Anders, on a paumé le toubib pendant la pluie de cette nuit, j’crois! Y’a Jasper qu’a besoin de soins, il a pas pu se protéger à temps ce con, il a douillé toute la nuit et… » La pilote beugla un. « Ta gueule ! » Tout en donnant un coup de pied dans la porte qui s’ouvrit sur Rocket, le percutant de plein fouet. Il s’étala au sol en poussant un couinement de douleur et porta immédiatement ses mains à son visage, pressant son nez cassé par l’impact.

Elle allait le tuer.
Cet espèce de connard venait la réveiller en cognant sur sa porte comme un demeuré alors qu’elle était en train de renouer avec sa soulmate et en plus c’était parce l’autre attardé de Jasper n’avait pas pu se protéger ?
Elle allait le tuer. Et Jasper avec.

Elle sortit de ses quartiers et s’avança vers Rocket, les traits déformés par la colère. « J’en ai rien à foutre que Jasper soit en train de douiller. S’il était pas aussi con il se serait planqué direct. » Rocket lui lança un regard perdu, incapable de comprendre pourquoi elle était dans cet état et son regard capta finalement Ifan qui se tenait en retrait. Son regard passa du brun à la pilote plusieurs fois avant qu’un sourire n’apparaisse sur son visage. « Eh ben je vois que le toubib s’est bien occupé de toi hein. » Kate s’immobilisa et fronça légèrement les sourcils. Oh non. Il n’allait pas…
Il tourna son regard vers Ifan. « T’as passé la nuit à la soigner ? Veinard ! » Kate lui mit instantanément une droite et grogna une insulte quand la douleur dans son épaule se réveilla. Elle l’ignora du mieux possible et saisit Rocket par le col pour le frapper une nouvelle fois avant de rapprocher son visage du sien, le fusillant du regard. « Si tu l’ouvres encore je t’égorge c’est clair ? » Tous les membres du gang présents étaient en train de les observer et certains commençaient à s’avancer lentement, sans doute pour essayer de les séparer dans la foulée. « Alors maintenant tu fermes ta gueule, tu retournes t’occuper de Jasper et le toubib verra ce qu’il peut faire plus tard. »
Un des Shadowrunners se rapprocha un peu plus et Kate repoussa Rocket, sa tête heurtant le sol au passage. Elle se releva, balaya l’assemblée du regard et grogna un. « Qu’est ce que vous regardez bande de connards ? » Auquel personne n’osa répondre et ils se dispersèrent rapidement.

La pilote porta sa main à son épaule blessée, la faisant légèrement bouger et elle grogna un. « Fuck. » Quand la douleur se réveilla un peu plus. Elle retourna vers Ifan, bousculant gratuitement un des Shadowrunners sur son chemin d’un coup d’épaule et rentra dans ses quartiers.

Elle attendit qu’Ifan la rejoigne, crachant un. « Mais quel fils de pute ! » A l’attention de Rocket et soupira bruyamment en secouant la tête. Elle posa son regard sur Ifan et reprit la parole une fois son calme un peu retrouvé. « Je… Merci pour... » Qu’est ce qu’elle était censée dire ? Elle n’en avait absolument aucune idée. Elle n’était même pas sûre qu’il y avait des mots pour décrire ce qu’il s’était passé dans ce rêve. « Il faudra qu’on… » Qu’on quoi ? Se revoit ? Qu’on en reparle ?
Putain elle se sentait terriblement nulle.
« Il vaut peut être mieux que j… » Elle désigna son épaule blessée du pouce sans savoir vraiment ce qu’elle voulait dire. « Et désolée pour hier soir. » Elle ponctua sa phrase par un mince sourire un peu crispé et se mordit la lèvre inférieure, incapable de savoir quoi dire de plus.

Il se masse l’une de ses tempes, les yeux fermés et lèvres pincées. Loa vient de se faire réveiller à son tour, lèche le dos de sa main, et commence même à la mordiller pour avoir son attention, tant appréciée. « Rah, merde, Loa… » en ôtant cette dernière loin de son museau blanc — alors qu’au même moment, un « Ta gueule ! » familier résonne dans la pièce, il y a le bruit du métal qui claque brutalement, son qui fit grimacer Ifan davantage, en plus d’attirer son attention.

Pendant que Kate était vraisemblablement en train de parlementer, Ifan prit son temps pour se lever, le confort ayant été des plus rudimentaires pour cette nuit-là — même le gazon aurait été plus confortable, s’il n’avait pas été souillé par une pluie acide pendant la nuit. Mal au dos, au cul, et maintenant à la tête, à force d’entendre beugler sa soulmate. Le rêve a été balayé avec violence par la réalité, il ne parvient même pas à se replonger dans cette sphère doucereuse qui est la leur, c’est trop dur, et l’action l’emporte sur sa volonté de méditer, de se poser. Non, au lieu de ça, l’altéan s’est hissé sur ses jambes, Loa lové à son cou, la démarche lourde et assez lente, parce que oui, il a beau être matinal, il a mal. On pourrait même croire que c’était lui le fiévreux dans l’histoire. D’ailleurs, est-ce qu’Anders avait prit son cachet quand il le lui avait donné la veille ? Il ne serait même pas étonné de savoir qu’elle l’a laissé près de sa sainte bouteille. Oh que si, il comptait bien la voir le bouffer ce cachet, parce qu’en plus d’être une denrée rare, il se refusait d’être venu pour des prunes. Qu’est-ce qu’il allait dire aux autres après, hein ? Déjà qu’ils allaient les voir au même endroit au petit matin…

Détail qui n’échappa pas à Rocket, qui aperçut Ifan, dès lors où il entra dans son champ de vision — pourtant, il était en retrait, et fixait la scène en simple spectateur, l’air toutefois irrité. Mais ça, Rocket ne le verrait probablement jamais, parce qu’il n’était qu’un petit con sans cervelle, et les mots qui suivirent ne firent que confirmer l’éternel cliché dont il était victime.

« Eh ben je vois que le toubib s’est bien occupé de toi hein. » c’est qu’il sent l’adrénaline monter aussitôt, elle se libère dans ses membres alors que son rythme cardiaque redouble de pulsations. Ifan s’avance d’un pas, il le fixe, coi, de toute sa hauteur. Rocket ne le regarde pas, au moins jusqu’au moment où il lâche. « T’as passé la nuit à la soigner ? Veinard ! » et serre les mâchoires tout en grignotant l’espace qui les séparait — mais Kate lui fout une droite en première, et pour une fois, il lui accorde que celle-là n’était pas assez forte pour ce qu’il méritait vraiment. Ifan se ronge le frein, il a les mains refermées dans des poings alors que Kate déverse sa colère sur les autres, qui finissent par dégager. Il ne l’avouera pas ouvertement, mais tous ces regards sur lui l’ont rendu profondément mal à l’aise. Et il n’était pas au bout de ses peines, il le savait. La journée, non, la semaine peut-être, allait être couverte de remarques lourdes et provocantes. Son âme de healer allait être mise à rude épreuve. Mais s’il fallait passer par ça pour atteindre la salvation… il s’y plierait volontiers. Mr Jingles allait pouvoir chier dans toutes les grolles du campement qu’il s’en foutrait à ce stade.

Lorsqu’ils sont à nouveau seuls, (privilège éphémère), il eut une pensée silencieuse. Des fois, je me demande comment t’arrives à survivre avec autant de cons au mètre carré. Et réalise qu’il a bien réussi, lui, sauf à rester relativement sain mentalement à Oriel… c’est bien là où il avait échoué, c’est ça qui avait coûté l’intégrité de son clan, de sa famille. Ifan la rejoint, il la laisse parler, ou plutôt baragouiner. Lui est encore piqué par la colère, son regard vaque çà et là, irrité. Il ne tient pas en place, malgré son silence qui pourrait camoufler tout ce qu’il était en train d’inhiber de toutes ses forces.

« Je… Merci pour… » il était en train d’expirer de l’air, un air qui chevrote un peu d’ailleurs, entre ses lèvres. Le changement de ton de Kate attire son regard qu’il laisse courir sur son visage. Elle a presque l’air reposé, même s’il est certain que plusieurs heures de repos en plus lui étaient nécessaires pour que son organisme puisse se battre convenablement. Sauvegarder son énergie… autant dire, quelque chose qu’elle ne fera jamais, et certainement pas aujourd’hui. « Il faudra qu’on… » « Ouais, t’inquiètes pas… » dit-il en hochant un peu la tête, il a beau essayer d’être sincère, il a l’air un peu trop lointain pour qu’il y ait vraiment cette sensation authentique. Puis même, ça veut pas dire grand-chose son « t’inquiètes pas », c’est comme s’il préférait qu’elle se fasse pas trop de mal à essayer de se justifier. « Il vaut peut être mieux que j… » « Que tu prennes le cachet que je t’ai filé hier, oui, j’préfèrerais autant que tu souffres moins et que j’bosse pas pour des prunes. » lâche t-il dans une expiration, incapable d’esquisser un sourire — il est un peu plus calme on dirait, mais il reste nerveux, et c’est bizarre qu’il ait l’œil aussi triste, d’ailleurs, cette blase doit rendre compte de son agacement, la faute à l’autre — « Et désolée pour hier soir. » « Ça va… c’est oublié. » et baisse un peu la tête, Mr Jingles couine un peu. C’est qu’il a envie de pisser en plus d’avoir mal partout… « Je pense repasser ce soir. Je préfère vérifier l’état de ta plaie et refaire un pansement, c’est plus prudent. » ce n’était pas tant une demande mais une affirmation, il devait lui changer son pansement, quoi qu’elle dise. Ifan alla récupérer le kit qu’il avait laissé au sol, d’un geste lent et semble t-il, pénible pour ses muscles encore froids.

Alors il progresse lentement vers la seule issue. Il s’arrête, lui offrant son profil par un léger mouvement de pivot. « Fais attention à toi. » il avait failli le dire dans son dialecte natal, chose que Kate n’aurait pas comprit. Il avait échappé de peu à la honte. Il allait lui faire dos lorsqu’il s’arrêta dans son mouvement, l’air de réfléchir une fraction de secondes. (Il a toujours l’air un peu dans les nuages.) Brièvement, le métamorphe va chercher son visage des yeux, lui cédant. « Ah, et Jasper et Rocket peuvent aller se faire foutre pour les soins. » et sortit des lieux, prêt à affronter cette bande d’idiots décérébrés pour la journée.