cons list (evan)

Parker, elle a cette relation avec Evan, qu’est bien particulière. Mais après tout, toutes les relations sont particulières, uniques. Celle ci plus qu’une autre ? Peut-être. Peut-être pas, encore. Mais Parker sait, sent, voit qu’il va pas bien, Evan. Y’a cinq ans, quand elle l’a rencontré, il avait un autre visage, d’autres expressions. Et pour avoir été le premier visage qu’elle a vu ici, elle s’en souviendra toute sa vie, de ce visage. Et ce visage, c’est pas le même que celui qu’il arbore aujourd’hui. Ce visage, il est différent. Ce visage, il est triste, dépité, défaitiste, presque. Et Parker voudrait pouvoir savoir ce qu’il a, elle voudrait essayer de le comprendre, pour pouvoir le réconforter. Pour pouvoir l’aider.
A briller, de nouveau.

Elle sourit après ses paroles. Parce que c’est vrai, tout ce qu’elle a dit. Quand elle a débarqué à Altéa, tout était si différent. Elle a flippé. Son compteur qui décide de s’arrêter, les arbres, verts et magnifiques. L’air, plus pure que sur Sigan. Tout, ce jour là, l’a frappé comme une massue sur le crâne. Et cette douleur, cette douleur, elle s’en souviendra toute sa vie. Comme si ses poumons s’étaient soudainement vidés complètement de leur air. Comme si elle étouffait, comme si un partie d’elle mourrait, un peu. Elle avait dû supporter ça, quelques petits jours, toute seule. Puis Evan avait débarqué. Comme un chevalier servant sur son bel étalon blanc. Il l’avait sauvé de sa solitude, de sa peur continuelle. Il lui avait apporté de quoi manger, lui avait même proposé un refuge.
Sans Evan, qui sait ce que la petite Parker serait devenue, dans les rues d’Altéa. Si, ce jour là, elle n’avait pas prévu d’aller le voir, elle aurait peut-être jamais rencontré la mère de la famille Boyle. Elle aurait jamais été accueillie dans cette famille, dont les membres la considèrent des leurs. Elle serait jamais devenue Jesse Boyle, et serait restée une Parker Shaw perdue dans des rues sombres et inconnues. Avec un compteur arrêté. Et la peur au ventre.

Elle hoche la tête quand il lui pose la question. Il l’a aidé à brillé, oui. Parker Shaw brillait sur Sigan, mais sur Altéa, elle était éteinte, comme transparente dans la nuit. Et l’étoile est arrivée, lui a donné un peu de sa brillance, et a aidé la sombre Parker Shaw a redevenir la rayonnante qu’elle était à Sigan, l’a aidé à devenir Jesse. Et Parker, elle a toujours aimé aider les gens, mais en plus de ça, là, elle se sent redevable. Elle doit réussir à le faire briller de niveau. Elle doit au moins participer à ce projet. Parce qu’elle aime aider les autres. Qu’elle lui doit la vie.
Et que les ténèbres, il doit détester ça, l’étoile brillante.

Elle le regarde quand il baisse les yeux vers elle. Et elle le voit sourire. Encore, pas le même sourire. Ce visage a tellement changé. Si elle le connaissait pas aussi bien, elle penserait qu’il a loupé une opération chirurgicale. Une autre personne. Une autre période de sa vie. Une autre manière de briller. Silencieusement. Et ça lui suffit pas. Il y a des gens fait pour ça, ceux qu’aiment pas trop ça, le feu des projecteurs. Et y’a les autres, tous les autres. Elle, lui, ils ont besoin de briller. Que ce soit pour être connu, reconnu, avoir la capacité de faire ci ou ça. Avoir ce plus que les gens autour n’ont pas. Pour en fait des choses, négatives ou positives. Toutes sortes de personnes, ont ce besoin, de briller.
Evan et Parker, l’ont.

Il sert sa main, et elle sourit. Elle pose la tête sur son épaule, à Evan, regarde plus les étoiles, mais devant elle. Elle écoute, assimile ce qu’il lui dit. Elle essaye de donner un sens à ses paroles. Quelque chose qui pourrait l’approcher de ce problème qui semble lui ronger le bonheur de tous les traits de son visage. Et finalement, elle trouve pas. Elle voit pas. Comprend pas. Elle garde la tête posée sur l’épaule de l’ami, et elle ferme les yeux.

Quoiqu’il se soit passé, Evan, pour que tu perdes ta brillance. Tu la retrouveras, c’est sûr. Tu es de ceux qui ont besoin de briller. Et comme moi, tu es doué pour ça, briller. Ta place, un jour, tu la retrouveras. Elle brillera. Et t’auras plus qu’à la rejoindre.

Et elle hoche la tête, le joue collé sur son épaule. Oui. Un jour, Evan, il recommencera à briller.

À quelque part, t’es rassuré à l’idée de l’avoir aidé à briller d’une façon ou d’une autre. C’est comme si à défaut de pouvoir continuer à illuminer le ciel, tu as au moins réussi à y faire monter quelqu’un d’autre. Jesse est, de ce fait, ton héritière de brillance et c’est toujours ça de pris. Ce sera au moins une réussite dans ta vie d’échecs (oui parce qu’une telle pensée se veut encourageante). Peut-être que ça devrait te suffire, il ne semble pas que tu l’empêches de briller maintenant. Jesse est donc le résultat positif de tes bonnes actions, le rayon de soleil dans l’obscurité de tes erreurs. Peut-être qu’elle pourrait même t’aider à voir plus gentiment tes mauvaises décisions, après tout, elle ne peut qu’être mieux placée pour voir les choses. De nouvelles lunettes, une meilleure vision.
Sauf que tu ne dis rien de clair et préfère plutôt supposer que tu retrouveras ta place un jour. C’est un vain espoir auquel tu ne peux pas te raccrocher tellement il te parait improbable. Si tu as réussi à aider Jesse, tu ne parviendras pas à faire un tel coup de maitre avec ta propre personne. La rousse se montre un peu plus tendre à ton égard. Sa présence est d’elle-même rassurante, sentir sa tête se poser sur ton épaule t’apaise en quelque sorte. Elle t’affirme même que tu retrouveras ta brillance un jour, peu importe la raison qui te l’a fait perdre en premier lieu. T’en doutes, vraiment, mais tu n’oses pas l’admettre. Peut-être que tu as peur de la décevoir en refusant ses belles paroles. C’est pourtant plus fort que toi, comme si le seul chemin qui s’ouvrait à toi était l’abime. Chaque jour les choses risquent d’empirer. Ta dépendance au flash est toujours un peu plus prenante comme un mal qui te ronge ton corps pour s’approcher de ton coeur. Ça n’ira pas en s’améliorant, tu le sais. Puis, il y a le risque que quelqu’un découvre ton secret : l’équipe, Jesse… Noa. Penser au jeune homme ne t’aide d’ailleurs pas plus que ça. Tu le chasses de ton esprit pour te concentrer à nouveau sur la jeune femme. Elle est une valeur sure, une présence réconfortante.

« Tu penses pas que c’est impossible parfois ? » La question tu la poses, mais tu n’as pas envie d’entendre la réponse. Tu as bien trop peur qu’elle te réponde par l’affirmative. Parce que ce serait la preuve que t’es peut-être une peine perdue, un cas désespéré. Bien sur, c’est injuste de ta part de mettre toute cette pression sur ses épaules pour une question qui peut sembler presque anodine. Peut-être qu’il vaudrait mieux que tu sois plus explicite. « Je sais pas, j’ai l’impression d’avoir trop merdé pour ça. » Oh c’est sérieux pour une fois. Comme si tu dis vraiment ce que tu as sur le coeur cette fois. C’est effectivement véridique, l’idée d’avoir trop échoué, d’avoir pris les pires décisions possibles au point où ça ne peut plus être rattrapé, jamais. Tu n’expliques pas de long en large, tu ne donnes même pas plus de détail pour qu’elle puisse saisir le fond du problème. Tu lui as seulement lancé une petite bribe d’information. Quelque chose de bien déprimant.

Mais puisque tu ne veux pas admettre ce qui te ronge autant, il te faut changer le sujet de la conversation. Sinon c’est un terrain glissant sur lequel tu t’engages. Parce que si tu lui expliques en quoi tu as merdé, tu vas forcément devoir dire que tu as pris des mauvaises décisions et peut-être même spécifiquement lesquelles. Tu préféras donc prendre la solution facile : celle de changer le sujet de la conversation. « Enfin c’est pas si important. » Évidemment, comment pourrais-tu dire autre chose ? Ton but c’est de lui changer les idées pas de noircir le tableau avec tes problèmes. Tu ne te relèves pas immédiatement, ne voulant pas perturber la sorte de quiétude que votre installation te permet d’atteindre. « Il y a plus intéressant ici. » De toute façon tout est plus intéressant que tes problèmes, c’est bien ce que tu te dis. T’essaies de penser à ce que tu pourrais lui montrer dans le planétarium. Il y a certes des petites expériences à faire un peu partout, mais tu ne sais pas à quel point ça peut être intéressant pour elle. Il faut dire que ton expérience de l’endroit a surtout été acquise à un jeune âge ce qui brouille les pistes pour aujourd’hui.  

Parker, elle croit en l’entraide chez les gens. Sa philosophie de vie comprend que les gens vivent ensemble parce qu’ils peuvent, les uns et les autres, s’apporter quelque chose. Que ce soit aussi simple qu’un homme qui fabrique des vêtements va apporter ses produits aux autres, ou moins évident, comme une personne qui va aller sauver quelqu’un, juste parce que, il aurait aimé que cette personne fasse la même chose, pour lui. La solitude, il parait que c’est bien, c’est beau, c’est paisible, mais Parker y croit pas. Parker, elle sait que la solitude, c’est des gens qui, probablement, ont peur de pas trouver leur place. Parce que seuls, finalement, on pourra jamais aller aussi haut que des gens, ensemble. Alors oui, l’argent, la gloire, tout ça, ça aide. Mais finalement, quand on réfléchit bien. La gloire, on l’a parce que des gens nous la donnent. L’argent, il vient bien de quelque part, d’autres personnes. Rien ne se fait, ne se gagne, totalement seul. Et Parker, elle pense qu’aider les autres, c’est quelque chose d’obligatoire. Pour Parker, aider les autres, c’est une façon de vivre une belle vie. Voir le sourire sur le visages de personnes qu’on a aider, c’est merveilleux. Et elle le voit, quand elle dit à Evan, qu’il l’a aidé. Elle voit ce sentiment sur son visage à lui, ce sentiment qu’elle a tant, quand elle aide les gens, souvent.
Alors cette fois, c’est à son tour. Et au début de la conversation, Parker avait pas envie d’insister. Parce qu’après tout, il est assez grand pour savoir de lui-même s’il veut, ou non, en parler. Mais il est tant de changer de tactique. Parce qu’à ce rythme là, Evan va terminer sa descente aux enfers, seul. Et qu’il va refuser l’aide de tout l’monde. Qui sait s’il refuse pas même de s’avouer, lui-même, qu’il a des problèmes.
C’est gros comme le nez au milieu de la figure, mais sait-on jamais. Parfois, les gens évitent de voir la vérité, plutôt que de se laisser la souffrir. Sauf que Parker, elle veut pas qu’Evan soit dans cet état là. Elle préfère qu’il souffre un bon coup. Et qu’il se calme. Et qu’il redevienne l’étoile brillante qu’il était.

Et elle aimerait qu’il le fasse avant qu’Aquila trouve un moyen de les ramener, tous les deux, sur Sigan. Parce qu’une fois qu’elle sera partie, elle pourra plus rien faire pour l’aider.
Et ça, elle aime pas.

Elle l’écoute, répondre à son affirmation. Elle la trouve débile, sa question. Aussi cliché que ce soit, rien n’est impossible. Réellement. Des gens arrivent à passer d’un monde à un autre. D’autres mondes existent, on sait pas trop combien. A partir du moment où les lois de l’univers qu’on semble connaître deviennent inconnues. A partir du moment où ce qu’on pense le plus impossible devient possible, on est en droit de se dire que tout, tout est possible. Et pour Evan, retrouver sa place, sa brillance, ça a rien d’impossible. A côté du mécanisme inconnu de changer de monde, qu’Evan retrouve sa brillance, c’est du domaine du carrément possible. Non, même du probable.
Peut-être que sa place changera, ça Parker en sait rien. Mais il brillera de nouveau.
Elle a envie de réagir, mais elle préfère le laisser aller au bout de ses pensées. Et elle l’entrevoit, s’ouvrir, lui parler. Trop merdé. Qu’est-ce qu’il a fait ? Merdé dans quoi ? En quoi ça l’empêcherait de briller de nouveau ? Ca y est, il a passé cette barre, où, si Parker lui demande, ce sera pas vu comme de l'indiscrétion, mais juste comme la réaction normale d’une amie qui s’inquiète.

Pourtant, il essaye de changer de sujet.

Mais encore, cette fois, Parker est l’amie qui s’inquiète. Elle se lève de son siège et vient s’accroupir devant Evan, gardant sa main dans la sienne, prenant l’autre main avec celle qu’elle a de libre.

Evan… Ici, y’a rien de plus intéressant que toi. Que le fait que tu brilles plus, et qu’un jour tu brilleras de nouveau. Et tu sais, je vais repartir chez moi un jour, obligatoirement. Et je veux absolument qu’avant, tu aies retrouvé ta brillance. Parce qu’il y a que comme ça que tu seras Evan, le vrai, gentil, Evan. Et. Je veux pas partir. Non. Tu sais quoi ? J’ai pris une décision. Je partirais pas, tant que t’auras pas retrouvé une façon, ancienne comme nouvelle, de briller.

Aquila risque de faire la tronche. Mais manifestement, la colonne des contres retour sur Sigan vient de prendre largement le dessus. Avec un nom, écrit en lettre capital. Evan.

Tu te laisse aller, toujours un peu plus. Peut-être parce que t’es conscient que t’as besoin d’aide et que tu te décides enfin à la demander. Enfin, ce n’est pas exactement ça non plus. Puisqu’au fond, tu ne la demande pas, pas directement. Tu n’oses pas le faire et ça, ça a toujours été le cas. Il n’est pas si difficile de trouver une explication, même qu’elles pleuvent. Tu ne veux pas décevoir, tu veux réussir à remonter la pente tout seul. Les mêmes raisons qui t’ont mis dans la situation à la base au fond, cette envie de briller qui te brûle les ailes. C’est bien ce qui t’a amené sur une pente glissante en premier lieu. Peut-être que quelqu’un de plus sage comprendrait que briller à tout prix n’est qu’une bien mauvaise idée, mais toi tu ne vois pas les choses sous cet angle. Parce que si tu ne peux pas briller, à quoi peux-tu bien servir ? C’est une nouvelle question qui restera sans doute sans réponse. Tu n’oses pas la poser, toujours par crainte de la réponse.
Tu te décides pourtant à lui demander si elle pense que c’est impossible pour toi de retrouver ta brillance. C’est une question plus importante qu’on ne pourrait le penser et tu es terrifié à l’idée qu’elle juge que c’est impossible. Bien sur ce serait étonnant venant de Jesse. Tu ne l’imagines même pas dire une telle chose, mais ça te fait peur quand même. Parce que si elle dit ça, c’est bien que c’est peine perdue. Tu ne t’aides surement pas en lui avouant que tu as peut-être trop merdé. C’est un indice comme quoi, à tes yeux, c’est impossible de briller à nouveau. Ce n’est rien de précis ou même de clair, mais c’est sérieux et c’est vrai, surtout.

Sauf que voilà, à force d’aller dans le sens de la vérité, de l’honnêteté, tu prends peur et tu te ravises. Tu lui dis que ce n’est pas grave, pas assez important. Que tu n’es pas assez important pour accaparer toute une conversation. Il faut dire que tu te sens mal aussi, parce que le but de l’inviter, c’était bien de lui changer les idées pas de l’accabler avec tes propres problèmes. Tu veux donc changer le sujet, lui indiquant qu’il y a plus intéressant dans le planétarium. Tu le penses réellement, tu te dis qu’elle pourra ainsi sauter sur l’occasion d’une conversation plus légère et plus plaisante. C’est pourtant te méprendre sur qui elle est. Tu le sais au fond. Depuis votre rencontre, même si à la base tu es celui qui l’a aidé, elle a toujours été là. C’est une bonne amie. Meilleure que tu pourrais le mériter d’ailleurs.

Tu la regardes donc en silence alors qu’elle se place devant toi. T’es surpris par ce qu’elle te dit. Tu as toujours su - à quelque part - qu’elle repartirait un jour. Tu ne comprends pas les allants et venants, mais tu sais qu’un jour elle disparaitra comme elle est arrivée, sans prévenir. Pourtant, là t’es confronté à la réalité qu’un jour elle ne sera plus là, mais ce n’est pas tout de suite. Non, elle a décidé de rester ici pour toi, pour que tu retrouves ta brillance avant qu’elle ne reparte. Ça ne te fait que sentir plus coupable, cette pointe de culpabilité qui te serre le coeur. « T’as pas à faire ça… » Brève protestation qui n’aura sans doute aucun effet sur votre discussion. Et à défaut de pouvoir la convaincre qu’il vaut mieux pour elle qu’elle oublie tout ça…. Peut-être qu’il vaudrait mieux que tu admettes certaines choses ? Tu hésites un moment. Tu ne peux pas remercier sa gentillesse à ton égard en la repoussant, mais tu ne peux pas admettre que tu te drogues. Pas comme ça, pas tout de suite. Alors tu commences avec quelque chose de plus simple à dire. « J’ai merdé, c’est aussi simple que ça. » Ce n’est qu’un début et tu soupires avant de te lancer plus sérieusement : « Tu sais que je suis dans une équipe de Small Science ? J’étais dans une autre équipe avant, mais je me suis fait viré pour une erreur. Alors j’ai rejoint les Misfits j’ai voulu m’assurer que je referais pas la même chose… » Et c’est là que tu as merdé. Pour ne pas décevoir ta nouvelle famille. « J’ai commencé à prendre quelque chose pour m’aider. » De la drogue. Sauf que le mot ne veut pas traverser tes lèvres. T’as bien trop honte en ce moment.

Parce qu’Evan, il est important. Il l’est depuis le début, depuis son arrivée. Il l’est parce que, sans rien attendre en retour, il l’a aidé. Qu’il lui a sauvé la vie, à elle, cette p’tite fille de quinze ans qu’il avait jamais vu de sa vie. Que parfois, Parker, sur une action, une bonne action, une grande action, elle juge quelqu’un. Et elle a jugé Evan dès ce premier jour, celui où il lui a apporté de quoi manger. Evan, ce jour là, il était bon. Et Parker sait que quand quelqu’un est bon, il le reste. Il peut se passer plein de trucs dans sa vie qui pourraient faire croire que c’est pas l’cas. Il peut briller, moins, comme c’est l’cas d’Evan actuellement. Mais jamais, ces gens, deviendront mauvais. Vraiment, mauvais. Evan, il va juste mal. Il se sent perdu, probablement. Et Parker, elle veut l’aider, l’aider à s’en sortir, à. Elle veut être là pour lui, au moins une fois, comme lui a été là pour elle.
Parce qu’Evan, il est important.
Parker, elle a l’impression de s’adresser à une personne en verre, sur l’point de se briser en milles morceaux. Alors elle prend ses mains, mais en douceur. Elle lui dit les mots qu’elle a besoin de lui dire pour qu’il comprenne, qu’elle le laissera pas vraiment partir d’ici sans avoir au moins essayé de l’aider. Mais avec douceur. Comme pour pas frustrer, pour pas énerver, pour pas blesser, pour pas briser encore un peu.

Pas à faire quoi, qu’elle voudrait demander, Parker. Il agit comme si c’était une obligation pour elle, quelque chose qu’elle faisait pas de son plein gré. Alors qu’en fait, c’est plutôt l’inverse. Elle se met en position pour l’aider, mais si ça s’trouve, Evan, il en a pas besoin, de son aide. Il la veut pas. C’est plutôt elle, qui lui impose quelque chose qui pourrait être contre sa volonté. Et alors que ça devrait la déranger, alors qu’elle devrait se rétracter et se remettre à parler des étoiles, elle le fait pas. Parce qu’Evan, est trop important. Et son bien-être l’est, lui aussi.

Merdé, qu’il dit finalement. Il a merdé. Merder, c’est tellement large. On peut merder de tellement de manières différentes. Et puis, il lui a déjà dit, ça, qu’il avait merdé. C’est rien de nouveau. Peut-être qu’elle va pas réussir à le faire parler de ses problèmes. Peut-être qu’il va refuser son aide. Et Parker sait que si c’est l’cas, elle insistera pas. Pas aujourd’hui. Pas maintenant.
Mais elle reviendra à la charge, plus tard, dans la semaine, dans le mois. Avant de partir, elle aura aidé Evan, qu’il le veuille ou non.

Et alors qu’elle s’apprêtait à se relever, il se remet à parler. Et il lui parle de small science. De ce qu’elle a compris, la small science, c’est un jeu, ici, le jeu de ce monde. Et c’est un truc important pour ceux qui y participent. Elle l’écoute, écoute. Les Misfits, elle a déjà entendu ce nom quelque part, peut-être, en tout cas ça lui dit quelque chose. Mais elle s’intéresse sur Evan, à ce moment précis. Parce qu’il s’est décidé à parler, parce qu’il a accepté, finalement, son aide.
Parker sourit tristement quand il termine sa phrase. Elle est pas débile Parker, aussi naïve soit-elle. Elle sait qu’il parle pas d’un truc légal, quand il parle de “prendre quelque chose” pour l’aider. Et c’est triste. Parce que ce genre de truc, ça détruit la santé. Et ça, c’est nul. Parce qu’Evan, il est mal, psychologiquement. Mais qu’avec ce qu’il prend, il va finir mal, physiquement, aussi.

Elle se relève, et se met à marcher, en cercle, tourner sur elle-même, regarder les étoiles.

T’es doué sans. Pourtant. C’était une erreur de parcours la première fois. Cette fois c’est une erreur pour la vie. C’est dommage. Alors que t’es doué, sans.

Elle veut pas avoir la voix de quelqu’un qui juge, Parker, parce que c’est pas un jugement. Juste une constatation. Evan, il prend des trucs pas légaux pour être meilleur. Mais il se voile la face, c’est pas lui. C’est plus lui, quand il prend ça. Et il est assez doué pour pas avoir à en prendre.
Et puis.
C’est d’la triche.

Que tu décides de te lancer et de lui admettre ce qui te tracasse relève du miracle. Ça te fait du bien aussi, à quelque part. Depuis le temps que ça te ronge, c’est un soulagement de finalement le dire à quelqu’un. Puis Jesse, elle n’est pas vraiment touchée par ce que tu oses faire, après tout, elle ne fait pas partie de l’équipe. Au moins tu n’es pas en train de gâcher ses chances d’avancer dans les tournois. Même que ça ne change sans doute pas grand chose à sa vie au final. Ça gâche la tienne, ça te bouffe à petit feu, mais ça c’est pas si important.
Sauf que voilà malgré le bien que ça peut te faire d’être finalement honnête avec quelqu’un, tu as tout de suite plus honte qu’autre chose. Parce que tu te sens idiot d’avoir pris la décision en premier lieu, tu te sens impuissant de changer quoi que ce soit dans cette réalité. Si tu avais pu changer de voie tu l’aurais fait auparavant, mais tu sembles destiner à cette vie de mauvaises décisions et de chute libre vers la déchéance.

Reste tout de même la réaction de Jesse. Après tout c’est ce qui importe vraiment au fond. Le soulagement que tu as ressenti, la honte qui t’accable à présent, ce n’est que des émotions passagères. Un état que ton coeur t’impose, mais qui se fera écarter automatiquement en fonction de comment elle va réagir à la bombe que tu viens de lâcher. Bien sur, tu n’as pas dit ce que tu prenais, mais elle n’est pas idiote au point de ne pas comprendre. Elle devinera bien que tu as consommé quelque chose d’illégal. Quelle drogue tu as pris exactement, ce n’est pas important. Dans tous les cas c’est mauvais et tu le sais. Ce n’est pas pour rien que tu te mets à appréhender sa réaction. Tu la regarde se relever et à marcher en cercle. Tu sais que ce n’est pas bon signe, tu le sens bien au fond. Tu commences à stresser davantage, chaque instant devient un peu plus insupportable pour ton coeur. Tu t’inquiètes, t’as un peu peur qu’elle te jette à l’instant où elle ouvrira la bouche. Ce sera probablement le cas. Tu le mériterais bien au fond.

Ce n’est pas exactement ce qui se passe. Au moins elle ne te rejette pas, mais sa réaction ne te fait pas plaisir pour autant. Parce que tu te sens mal, encore plus. Une erreur pour la vie. Elle a bien raison. Ça ne te conforte pas le moins du monde cela dit. Tu ne sens pas forcément de jugement dans sa voix, mais tu te juge toi-même. C’est tout ce que tu mériterais. « Je suis pas doué. » C’est de l’acharnement à ce point. « Pas assez. » C’est un peu plus près de la vérité. Parce que c’est vrai que tu as des lacunes, mais c’est surtout au niveau mental. Trop de pression qui tue tes chances de te montrer à la hauteur. Et tu as bien trop peur de commettre une nouvelle erreur pour te permettre aucune marche de manoeuvre. Mais peut-être qu’il vaudrait mieux que tu lasses tout tomber, que t’arrête cette grossière erreur, autant le sport lui-même que le Flash. Tu sais pourtant que ce n’est pas possible. Tu as besoin du sport et tu as besoin du Flash pour briller dans les tournois.
« C’est peut-être dommage, mais je fais de mon mieux. » Et là on voit le creux du problème. Tu ne te sens pas à la hauteur et son commentaire ne t’aide pas le moins du monde. Parce que tu te sens que plus con et t’as pas vraiment besoin de ça. Tu te relèves à ton tour. T’as qu’une envie maintenant, il n’y a qu’une chose que tu peux faire : fuir. Ce n'est pas que tu en veux spécialement à Jesse. Non, elle a raison, mais ce n’est pas ce que tu aurais voulu entendre. Tu aurais préféré un truc générique comme « ça va aller. » N’importe quoi d’encourageant à vrai dire. Tu fais quelque pas vers la sortie. Puis tu penses que ça se fait pas partir comme ça. Alors tu regarde ton téléphone rapidement avant de dire : « Quelque chose vient d’arriver, je te dis à la prochaine. » C’est qu’une excuse, même pas une bonne, mais tu t’en fiches un peu au fond. Tu veux juste partir. Alors tu ne lui laisses pas l’occasion de réponses et te diriges vers la sortie un peu plus rapidement cette fois. T’as besoin d’être seul, t’as besoin de t’en vouloir encore un peu plus.